Enfin, une réaction sensée, exprimée par un ministre canadien au sujet du fameux burkini devenu le sujet central de débat et de préoccupation de nos politiques, alors même que la situation économique du pays est catastrophique. Il n’entre pas en effet dans le rôle de l’État de contrôler la garde-robe des citoyens et de s’immiscer dans ce genre de détail. Cette affaire franco-française a provoqué l’hilarité générale par son caractère ridicule, tant ses initiateurs étaient aveuglés par leur souci de détourner l’attention des véritables problèmes et ce, en surfant sur la vague islamophobe en vogue, si pratique lorsqu’il s’agit de susciter la peur au sein de la société.
La volonté de bannir le burkini au Québec découle d’un «nationalisme peureux», dénonce le ministre Jean-Marc Fournier, pour qui « l’État n’a rien à faire dans la garde-robe des gens ».
Le débat relancé par l’interdiction du port du maillot dans certaines municipalités françaises a trouvé d’autres échos, jeudi, à l’Assemblée nationale.
Le ministre Fournier s’explique mal la position de la Coalition avenir Québec qui veut empêcher le burkini au Québec. Une proposition «totalement inconcevable dans une société comme la nôtre», estime le libéral. La conséquence directe sera l’exclusion des femmes visées, croit-il.
«On peut travailler pour une meilleure égalité, une meilleure compréhension, mais ça ne peut pas se faire en poussant les gens dans leur sous-sol, a affirmé M. Fournier. L’État, on l’a déjà dit, n’a rien à voir dans la chambre à coucher des gens. Il n’a rien à voir dans le garde-robe non plus. On doit avoir un certain respect pour la liberté des gens.»
Mais le ministre refuse de dire si le burkini peut être porteur d’un message politique. «Je ne sais pas ce que les gens veulent en leur for intérieur, dit-il. Je n’ai pas la science qui me permet de me projeter dans l’âme des gens. Je ne pense pas que c’est à l’État d’aller scruter l’âme des gens.»
Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, juge le burkini assez menaçant pour évoquer la «clause nonobstant» afin de l’interdire au Québec, malgré les chartes. « C’est quelque chose qu’il faut regarder », affirme M. Legault.
« C’est complexe de pouvoir faire disparaître ce symbole, mais on veut envoyer un message fort, a-t-il poursuivi. On ne souhaite pas tolérer ce genre de symbole. On a une responsabilité comme élus de dénoncer des revendications discriminatoires envers les femmes.»
Le débat est très mal engagé, selon la solidaire Manon Massé. Il faut se méfier des amalgames entre l’égalité hommes-femmes et la lutte contre le terrorisme, dit-elle. Comme féministe, elle n’a aucune envie que le gouvernement dise aux femmes comment s’habiller. Elle craint aussi la fracture sociale qui peut découler du débat, comme cela a été le cas lors de l’épisode de la Charte de la laïcité.
« À force de nourrir la peur, on envoie le message que l’Occident est islamophobe », estime Mme Massé.
Pas de « police des plages » pour Cloutier
Contrairement à son concurrent Jean-François Lisée, l’aspirant-chef péquiste Alexandre Cloutier n’a aucune intention d’envisager une interdiction. M. Lisée a écrit sur page Facebook que le Québec devra débattre non seulement du burkini, mais aussi de la burqa et du niqab.
« Je n’ai aucune intention d’instaurer une police des plages, a lancé M. Cloutier au Soleil. Je ne pense pas que les citoyens québécois s’attendent à ce que nous investissions des ressources supplémentaires dans la SQ pour patrouiller les plages du Québec.»
Les élus ont par contre le devoir de mettre en place des mesures pour lutter contre l’intégrisme et l’islamisme. Il entend faire connaître prochainement son plan d’action en cette matière.
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La Presse [Canada] — Le Soleil