Il est très curieux que ce soit des personnalités de la société civile qui demandent une enquête administrative, se substituant ainsi aux autorités qui auraient dû s’auto-saisir, devant la gravité des faits. Il faut bien avouer que le comportement du DIP est pour le moins étrange voire douteux, d’autant que cela concerne des viols présumés et des allégations d’agressions sexuelles contre de jeunes femmes, parfois mineures !
Un groupe de personnalités genevoises demande l’ouverture d’une enquête administrative pour faire toute la lumière sur les agissements de Tariq Ramadan lorsqu’il était professeur au collège de Saussure, a appris la RTS.
« L’omerta institutionnelle n’est plus acceptable ». Ce message fort se trouve dans une lettre dont la RTS a eu copie, signée par plusieurs personnalités, telles l’écrivain-reporter Laurence Deonna, la féministe historique Rina Nissim ou le député Vert François Lefort.
Une lettre datée de dimanche, adressée à la fois à la cheffe du Département de l’instruction publique (DIP) Anne Émery-Torracinta et au président du Grand Conseil Éric Leyvraz.
Dans leur missive, ces personnalités demandent l’ouverture d’une enquête administrative pour analyser “les dysfonctionnements de l’institution qui n’a pas su protéger les élèves de Monsieur Tariq Ramadan. Notamment dans le but d’établir la vérité sur les circonstances de son départ en tant que doyen et enseignant du collège de Genève en 2004”.
Charge contre Anne Émery-Torracinta
Le texte rappelle les témoignages accablants révélés dans la presse, à savoir que Tariq Ramadan entretenait des relations interdites avec des élèves, notamment mineures, et que le directeur du collège de Saussure de l’époque aurait reconnu avoir été informé de tels agissements. La doyenne de l’époque est elle aujourd’hui secrétaire générale du département. Un élève aurait lancé l’alerte.
Malgré la divulgation de ces faits, le DIP « n’a pas entamé de procédure administrative, profitant de la prescription de l’action pénale, de la peur des victimes et du silence de l’entourage », selon les signataires.
La charge est lourde et directe contre la conseillère d’État Anne Émery-Torracinta. Mais pour l’heure, seul le porte-parole du département Pierre-Antoine Preti s’exprime. Il rappelle qu’une enquête administrative ne peut être décidée que par le Conseil d’État in corpore, et uniquement à l’encontre d’un collaborateur en poste.
Par ailleurs, cette lettre pourrait comporter des éléments à caractère diffamatoire qui restent à étudier.
Compassion de l’État envers les victimes
Également interpellé par la lettre, le président du Grand Conseil Éric Leyraz attend quant à lui de traiter le sujet au Bureau du Grand Conseil. François Lefort, l’un des signataires, fait en effet également partie dudit bureau.
L’État n’a-t-il rien fait jusque-là dans l’affaire Ramadan ? En réponse à une succession de questions posées par la député PDC Anne-Marie von Arx, l’État a fini fin janvier par exprimer sa compassion aux victimes et a ouvert une ligne téléphonique où elles peuvent témoigner.
Laetitia Guinand – RTS [Suisse]