La quatrième catégorie : l’usurier
Un certain polémiste médiéval parisien prétendait que Dieu avait créé les prêtres, les soldats, les fermiers, tout comme les anthropologues contemporains après Dumezil parlent des classes visibles en Inde classique, mais que le diable avait ajouté sa propre création, les usuriers ! Le fameux Sir Francis Bacon a dans un écrit de 1612 “Of Usury” dénoncé ceux qui ainsi se mettaient au ban de la société, en prenant la voie opposée à la rédemption chrétienne, comme on peut s’en rendre compte par le passage suivant de son étude, précisant que tous ces usuriers “devraient porter des bonnets oranges fauves parce qu’ils judaïsent” (should have tawny orange bonnets, because they do Judaïze). Faudrait-il coiffer de pareils chapeaux nos économistes, le Bureau de la Réserve Fédérale en tête, sans oublier la championne qu’est la Goldmann Sachs, qui pratiquent toutes les astuces pour plonger les États gardiens ou têtes de peuples, dans une dépendance usuraire dont ils ne sortiront jamais, que par un paupérisme plus accentué ?
Il est donc étrange que l’on fasse mine de se battre encore, d’un côté pour prétendre défendre “les racines chrétiennes” de la France ou de l’Europe contre l’islamisme ou inversement, alors qu’aucun des deux mouvements actuels ne se distingue sur ce point d’économie politique et en fait ne serait, pour un Francis Bacon, que des variétés de la couleur fauve. Il est vrai que les élites républicaines comme la comique et plus enragée que réfléchie madame Morano se réclament, approuvées par le haut clergé, non seulement de racines chrétiennes, mais, précisent-ils, comme l’a fait l’exalté Léon Bloy, judéo-chrétiennes de la France. À cet égard, la parallèle avec” l’Islam de France” se manifeste aussitôt, et l’on verra, dans quelque temps, apparaître après des consultations entre doctes, le frère jumeau de celui qu’exhibe la laïque Morano, à savoir des “racines judéo-islamiques” de la France, qui pousseront sous une pluie d’orage laïque, que l’on pourrait formuler ainsi : laissons ce qui nous sépare et ne parlons que de cette foi que nous transmettons au peuple, celui du bonheur par le crédit ! En un mot est défini le progrès qui réunira les nouveaux fidèles, dans le même sens que l’on parlait des nouveaux Français en Europe après le début de ce complot nommé Révolution Française.
Tel est bien l’âge du Kali Yuga, à reparler indien, celui du triomphe de la créature dernière, la quatrième, comme l’on numérotait la dernière Internationale dont se réclament certains néoconservateurs dont l’un fut à la tête du FMI !
Aurons-nous ainsi précisé la couleur du bonnet républicain, dont se coifferont les clients des monarchies wahhabites, et précisé ce quatrième état qui fait, dans l’accouchement terroriste, son entrée sur la scène historique ?
Laissons de côté la recherche proprement historique qui nous promet de grandes désillusions, car la mémoire humaine est particulièrement frivole et menteuse aussi, comme l’amour chez un goujat ou l’admiration de la femme chez un Don Juan ! Mais regardons ce monde aux extrêmes : en quoi nos réformateurs ou fanatiques, au sens ancien de se tenir près des temples de la foi, remontent-ils à cette observation anglaise, se situent à son niveau ? Ils en parlent le jargon, mais toute cette noble et vaste pensée britannique contemporaine de Shakespeare, s’est évaporée au soleil brûlant de l’usure qui enchaîne non tel ou tel peuple infortuné, mais le monde même.
Tel est bien l’âge du Kali Yuga, à reparler indien, celui du triomphe de la créature dernière, la quatrième, comme l’on numérotait la dernière Internationale dont se réclament certains néoconservateurs dont l’un fut à la tête du FMI !