Alors qu’aucune date n’est encore fixée pour un procès, la pneumologue qui a mis au jour le scandale déplore que les avocats du laboratoire “contestent tout”.
La pneumologue Irène Frachon, qui a mis au jour en 2007 le scandale du Mediator, un médicament à l’origine de dysfonctionnements cardiaques, a dénoncé jeudi “le cynisme et la cruauté des avocats” du laboratoire Servier face aux demandes d’indemnisation des victimes. Alors qu’aucune date n’est encore fixée pour un procès, la médecin déplore que les avocats du laboratoire “contestent tout”, les pièces présentées par les victimes en vue d’une indemnisation, comme de nombreux actes de procédure.
“Les avocats de Servier savent faire feu de tout bois avec un cynisme et une cruauté qui dépassent l’entendement”, a déclaré sur RTL la pneumologue. “Dans des dossiers caricaturaux, où on a la preuve de tout, de la prise (du médicament), du dommage, du drame, ils contestent tout”, a-t-elle expliqué. La médecin, impliquée auprès des patients touchés par l’affaire du Mediator qui réclament justice, assure qu’il y a “des documents (de Servier) tellement violents pour les victimes que parfois on décide avec leurs avocats de ne pas leur montrer”.
“Les médecins peuvent intervenir”
Pour la pneumologue, la justice étant “empêtrée par les tentatives d’asphyxie des avocats de Servier”, le corps médical devrait réagir. “Les médecins peuvent intervenir (…) ils doivent rompre leur lien avec Servier tant que ce problème n’est pas résolu”, estime-t-elle. Selon elle, “il ne s’agit pas de prendre la place de la justice, il s’agit de dire : il y a des patients qui ont souffert, il faut les indemniser, ce n’est qu’à cette condition qu’on continuera à travailler avec vous“.
Dans ce contexte, Irène Frachon considère qu’aujourd’hui, “le scandale du Mediator, c’est le silence des médecins, le silence des sociétés savantes, le silence de l’Académie de médecine”. “Je ne le pardonnerai jamais à mes pairs”, a-t-elle affirmé. Le Mediator, prescrit pendant 30 ans, est à l’origine de graves lésions des valves cardiaques et pourrait être responsable à long terme de 2 100 décès, selon une expertise judiciaire. L’enquête est terminée depuis avril 2014, mais il n’y a pas de date de procès fixée à ce jour, en raison de plusieurs recours de Servier concernant la procédure. Me François de Castro, l’un des avocats de Servier, dénonçait fin juillet dans les colonnes du journal Le Monde “une instruction au pas de course”. “Nous ne cesserons de dénoncer ce dysfonctionnement qui consiste à ne désigner qu’un mouton noir et à épargner l’Agence du médicament.”