Can Dundar menacé par le président Erdogan pour avoir révélé des livraisons d’armes à des jihadistes syriens !

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Non seulement il n’y a plus complot mais politique étrangère pro Daech de la Turquie ; en plus, les autorités étatiques officielles accusent et menacent le journaliste qui a fait ces révélations d’armement de Daech en Syrie ! Ils appellent cela « révélation de secret d’État », qui serait plus exacte si elle était nommée « révélation de secrets mafieux et criminels sabbataïstes en vue de créer la chaos dans la région ! » Avec le PKK comme menace, ils ne vont pas trop l’ouvrir les journaleux locaux. C’est toujours la même mécanique, chaque état à son croquemitaine pour tenir son peuple ; en coulisse les affaires continuent de rouler…


Menacé publiquement par le président de la République, Recep Tayyip Erdogan, Can Dundar, 54 ans, directeur du quotidien de centre gauche turc Cumhuriyet, risque jusqu’à trente ans de prison pour « révélation de secret d’État » et « espionnage » après avoir publié des photos montrant des livraisons d’armes par les services turcs à des jihadistes syriens en janvier 2014. Lauréat du prix Homère du festival de Troie organisé à Canakkale (Dardanelles), il analyse la situation des libertés en Turquie alors même que l’AKP, le parti conservateur, au pouvoir depuis 2002, intensifie sa guerre contre la guérilla kurde.

Le Président a lancé à votre sujet : « Je ne le laisserai pas, je le suivrai et il devra payer la facture. » Êtes-vous inquiet ?

La mission du journaliste est de faire sortir les informations que les pouvoirs essaient de cacher. Nous ne pouvions pas nous taire quand nous avons appris que les camions des services secrets turcs transportaient des armes pour les jihadistes de Syrie. Pour nous, ce qui est déterminant, c’est la vérité. Nous avons montré comment certains provoquent la guerre. Nous croyons que l’opinion publique doit être informée sur tout, sur le pouvoir et sur ses actions, légales ou illégales.

Il paraît donc qu’Erdogan me suit. En venant ici, j’ai regardé derrière moi, il n’y avait personne, mais peut-être que ses policiers me suivent. J’ai fait mon métier alors que lui a fait des choses qu’il ne fallait pas. C’est pourquoi c’est moi qui ne le laisserai pas, et je veux qu’il paye un jour la facture pour ses actes.

Dans ce pays, nous subissons tous les jours les conséquences de l’aide apportée aux groupes islamistes radicaux de Syrie. Des soldats, des policiers, des civils et des militants armés kurdes sont tués dans les opérations lancées contre le PKK. Personne ne veut la guerre à l’exception d’une seule personne : Recep Tayyip Erdogan…

En Turquie, il n’est pas interdit d’envoyer clandestinement des armes aux terroristes, mais il est interdit de publier une telle information. Erdogan est dans une position plus difficile que moi. Moi, je suis jugé pour ce que j’ai écrit ; lui, il le sera un jour, j’espère, pour ce qu’il a fait ! Le monde entier connaît les relations qui existent entre ces forces des ténèbres et le président turc. Ce dernier croit pourtant qu’en nous menaçant, il va nous faire taire et que personne ne saura ce qui se passe.

Est-ce héroïque de faire du vrai journalisme en Turquie ?

La plupart des grands médias turcs se comportent comme des porte-parole du pouvoir et, en conséquence, les vrais journalistes passent pour des héros. Ils sont arrêtés, incarcérés ou même parfois tués… Je pense à l’avenir de mes enfants et je désire qu’ils vivent dans un pays où il y a la paix, la démocratie, les libertés. Dans la salle de rédaction de Cumhuriyet, où je travaille, les murs sont ornés de reproductions de unes historiques témoignant de nos tragédies. Celle du 24 janvier 1993, le jour où Ugur Mumcu, juriste, chroniqueur et journaliste d’investigation, a été tué par une bombe. Ou, trois ans plus tôt, la une du 6 octobre 1990 consacrée à la théologienne Bahriye Ucok, collaboratrice du journal, assassinée par un colis piégé. Ou celle du 21 octobre 1999 sur Ahmet Kislali, professeur de sciences politiques, ex-ministre et chroniqueur, tué par une bombe. Des crimes impunis. Il y a aussi la une du 21 mars 2008, quand le président de la fondation Cumhuriyet, Ilhan Selcuk, a été arrêté sur la base de fausses preuves dans le cadre de l’enquête Ergenekon [présumé complot contre le gouvernement de l’AKP impliquant des hauts gradés militaires, des ultranationalistes, des kémalistes, ndlr].

Votre thèse de doctorat portait sur les relations entre les médias et le terrorisme. Comment jugez-vous la situation actuelle ?

Les médias turcs ont pour la plupart raté l’examen… J’ai honte au nom de mes confrères. Il y a trop de médias qui ont endossé l’uniforme pour soutenir le pouvoir dans sa guerre contre le PKK avec, à la une, des manchettes et des photos pleines de sang, d’armes et de bombes. Mais je ne suis pas pessimiste. Nous, vous et moi, nos amis, nos parents, je veux dire la majorité de la nation, ne voulons pas la guerre, et nous pouvons trouver une solution pacifique et politique au problème kurde. Ces médias à la botte gardent le silence sur les événements qui gênent le pouvoir. Ils n’ont pas publié d’informations sur les bombardements d’un village kurde dans le Nord de l’Irak, où plusieurs civils ont été tués. Ils ne parlent plus depuis quatre ou cinq jours des martyrs de l’armée turque car le Premier ministre a prié – et ici, prier veut dire ordonner – les directeurs de publication des médias progouvernementaux «de ne pas insister sur les martyrs des forces de sécurité car cela peut démoraliser l’opinion publique». Ces médias ne parlent pas non plus des réactions des parents de policiers ou de soldats tués, car désormais ces gens disent à haute voix que leurs fils sont morts pour les intérêts du pouvoir et non ceux de la nation.

Recueilli par Ragip Duran (à Istanbul

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