[citation source=””]Biographie de l’auteur :
Après l’édition de sa thèse de philosophie, Lotfi Hadjiat a publié un essai préfacé par Roland Dumas intitulé Le bon grain tua l’ivraie. Il a ensuite donné plusieurs entretiens à la radio et télévision. Il écrit depuis des éditoriaux et des articles sur différents sites, livrant ses réflexions sur les sujets les plus sensibles et les maux de notre temps.[/citation]
Sorti en 2012, Et le bon grain tua l’ivraie, est un essai de Lotfi Hadjiat, préfacé par Roland Dumas, qui interroge en profondeur les idéologies dominantes de notre temps, dans le champs politique, morale, philosophique, historique et civilisationnel. Et en particulier le rationalisme, incarné dans le livre par le personnage de Sapiens. Cette idéologie hégémonique du rationalisme ne pouvant être critiquée par la raison exclusive elle-même, l’auteur créé un autre personnage, Fideis. S’ensuit alors un dialogue implacable sur les sujets les plus sensibles, les plus tabous.
Les prétentions de l’humanité sont ainsi mises face à sa nature mortelle et à son impossible destin. Sapiens est poussé par Fideis jusqu’au bout de ses contradictions, notamment autour de la question d’Israël. La perspective de dépasser Sapiens est au fond la perspective qui taraude l’auteur, à travers le personnage de Fideis. L. Hadjiat n’a de cesse de montrer les vanités des conceptions rationnelles en décelant leur logique sécuritaire. L’auteur en vient à conclure que la rationalité exclusive n’est plus émancipatrice. Et tente à travers Fideis, puis tout au long d’une partie entière d’aphorismes, de dessiner une voie émancipatrice. Après le terrible « Dieu est mort », lancé par Nietzsche, L. Hadjiat n’hésite pas à considérer que « la raison est morte », en tant que source d’émancipation. Pour retrouver la foi en une émancipation possible de l’esprit humain, l’auteur revient en particulier à l’imagination. Ses réflexions l’amènent finalement à reconsidérer la foi au divin, sous l’angle de l’émancipation.
Ce livre est le récit d’une conversion, d’une découverte de la foi au sein d’une pensée philosophique. La thèse de l’auteur se déploie en ces termes : il n’y a d’accomplissement de la philosophie que par la foi émancipatrice au divin. L’émancipation politico-économique par le combat dialectique rationnel en enterrant la métaphysique, comme l’envisageait Marx, est récusée par L. Hadjiat, pour qui l’aliénation humaine est plus profonde que l’aliénation politico-économique. « Marx était encore trop idéaliste ; l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de la lutte des places. La religion est l’opium du peuple mais dans la société égalitaire la place du chef est une drogue dure, plus dure encore que celle du sous-chef », ironise l’auteur, page 97. Pour ce dernier, l’aliénation est morale, spirituelle ; le pouvoir étant l’aliénation spirituelle quasi-indéracinable. On peut voir en effet aujourd’hui comment certains chefs de la mouvance dite dissidente se fourvoient dans l’aliénation spirituelle tout en hurlant leur émancipation politique. Sans parler de l’aliénation des dissidents à leur chef… La seule dissidence qui vaille pour l’auteur est une dissidence spirituelle, morale ; le plus parfait de tous les systèmes politiques possibles ne pouvant jamais rien contre l’abyssale aliénation humaine.
L. Hadjiat ne semble avoir plus aucune illusion quant à la réconciliation par l’égalité, « il n’y a d’égalité que dans le jugement divin », assène-t-il, page 98. En-deçà des images, les maux de l’humanité sont, selon lui, dans les représentations humaines… « égalité », « un », « multiple », « liberté »… L’auteur voit dans le culte de la représentation l’aboutissement de l’idolâtrie. « Il faut comprendre l’unique (le dieu unique) comme l’incomparable, l’irreprésentable, plutôt que comme l’unicité. L’idolâtrie, c’est adorer une représentation du divin, et l’unicité, tout comme les idoles est une représentation, même si elle est plus abstraite. Le divin est au-delà des catégories humaines qu’on lui plaque dessus : unique, multiple, seul, pluriel… les catégories de l’entendement ne peuvent le saisir, Kant l’avait bien compris. On peut seulement l’éprouver (le divin) dans la justesse de l’action », écrit-il, page 32. La pensée étant une action. Cet ouvrage nous convie finalement à avoir foi en son émancipation selon une pensée émancipatoire ; la vérité ultime de cette émancipation étant la foi au divin.