Ewan McMullin, le mormon très spécial
Il y a un contraste très frappant entre la réputation charitable, bien supérieure moralement à celle de la Croix Rouge, au témoignage des victimes civiles et militaires de la seconde guerre mondiale et de la guerre du Vietnam-Laos ou dite d’Indochine, et la colossale puissance des maisons de jeu de Salt Lake City, qui fait de l’Utah une marche importante du parti républicain, dont le rouge est la couleur fétiche. Cette semaine finale de la campagne électorale US a vu surgir le candidat mormon d’un genre très spécial puisqu’il occupe la première scène de la presse de gauche sioniste, du parti travailliste, Haaretz : “Le ticket présidentiel judéo-mormon, écrit ce 5 novembre 2016, le célèbre journal, en train d’essayer d’arracher l’Utah à Trump”. Nous pouvons ainsi sur le vif prendre l’animal politique, aurait dit Aristote, comme un poisson dans son aquarium, le héros paré des vertus civiques se nomme Ewan McMullin « mormon », nous apprend-t-on, “qui embrasse les homosexuels (gays) et les immigrants” et est populaire parmi ceux que l’on nomme les millennials, soit les 15-35 ans, les hyper-connectés à internet et nés entre 1980 et 2000, ouverts, comme il se doit, même superficiellement instruits, à une diversité culturelle et au co-working, comme on nomme le développement du collaboratif. Bref l’idole des jeunes.
Le programme de celui qui serait le tombeur de Trump dans l’Utah est un panaché, ce qui désaltère le plus politiquement : conservateur et favorable aux immigrants, mais un homme instruit, formé à la discipline de la CIA et qui a travaillé pour elle au Proche-Orient, ce que ses racines juives peuvent expliquer, et de talonner Trump de quelques points, suffisamment pour le faire chuter.
…sa mère est lesbienne et vit avec une autre femme, mais il approuve, « Evan is okay with that ».
Mais est-il à l’abri des scandales qui frappent les champions de la démocratie ? Il semble que capable d’évincer de l’Utah et Trump et Clinton, il puisse ponctionner les deux électorats, les prolos et les bobos, car enfin, comme le fait observer Haaretz il est mormon, comme 70% de l’électorat de l’État si riche, où l’argent du jeu n’a pas d’odeur : sa mère est lesbienne et vit avec une autre femme, mais il approuve, « Evan is okay with that », insiste le journal socialiste juif anglophone, et soutient la Cour Suprême désireuse, contre ce que la maçonnerie entend par des archaïsmes, légaliser tout cela, quitte à ce que la Justice, la déesse Thémis des Grecs fuit la terre pour avoir le sort enviable d’une constellation !
Si nous considérons les âges, la Clinton devient, le temps de lancer quelques bombes, une septuagénaire, Trump atteint aussi l’âge que Platon accorde au Conseil nocturne de la Cité idéale et bien sûr le prodigieux flambeau de l’Utah a la quarantaine, et représenterait bien pour Haaretz la génération marchant sur les ruines des deux antithèses, bref une nouvelle descente dans la liberté, comme est seul capable de nous conduire, comme Mercure psychopompe, entraîneur d’âmes, ce fonctionnaire de la CIA. Bien sûr, Evan est conciliant : s’il reconnaît dévotement la sainteté du mariage, le Tartufe mormon reconnaît que sa mère est libre, qu’elle est sa meilleure amie, bref tout cela ne vous donne-t-il pas l’envie d’émigrer dans l’Utah ?
Pierre Dortiguier