Il faudra enregistrer cette déclaration et la garder en mémoire, car elle émane d’un membre de l’opposition et le jour où il accèdera au pouvoir, il n’est pas sûr qu’il maintienne sa position et qu’il ne fasse pas lui aussi dans la surenchère. Toujours est-il que c’est l’islam qui est encore au centre des préoccupations des élites politiques alors que les vrais problèmes qui tourmentent le Français de base se situent ailleurs. Les politiques présentent le dernier rempart dressé contre la maçonnerie comme l’épouvantail capable de susciter de fortes émotions et des sentiments hostiles à l’égard des Français appartenant à cette religion. En somme un moyen démoniaque de créer le fossé qui divise et la guerre civile qui tue.
[citation source=”http://www.lejdd.fr/Politique/En-Tunisie-Fillon-sur-l-islam-Il-faut-qu-on-se-calme-731602″]En Tunisie, Fillon sur l’islam : “Il faut qu’on se calme” En visite en Tunisie jeudi et vendredi, l’ex-Premier ministre met son camp en garde contre toute “surenchère” sur la laïcité. Pour ne pas faire “le jeu des islamistes”. Le musée du Bardo a beau avoir rouvert ses portes au public après l’attaque du 18 mars, qui a fait 22 victimes en plein cœur de Tunis, ses grandes salles restent vides, et les traces du carnage sont bien visibles. François Fillon gravit l’escalier qu’ont emprunté avant lui les terroristes lancés à la poursuite des touristes qui avaient fui dans les étages. Visage fermé, il s’arrête longuement devant une vitrine criblée d’impacts de balles. En visite pour deux jours en Tunisie, l’ancien Premier ministre est venu affirmer la “solidarité” des Français avec cette démocratie encore fragile mais aussi chercher les réponses pour faire face, dit-il, aux coups de boutoir du “totalitarisme islamiste”. Relire notre interview du vice-président d’Ennahda : “La démocratie tunisienne est en danger”
Fillon sillonne le Proche-Orient
Liban, Irak, Jordanie, Émirats arabes unis… François Fillon, candidat à la primaire de 2016, sillonne depuis plusieurs mois le Proche-Orient. À Tunis, il a emporté avec lui un petit livre, En Syrie, un reportage de Joseph Kessel publié en 1926. De l’Iran au chaos libyen en passant par les hoquets de la jeune démocratie tunisienne, il se passionne pour cet Orient si compliqué parce qu’il en est convaincu : “Ce qui se passe ici est un sujet majeur pour l’Europe, et le problème de sécurité le plus important qu’elle ait jamais eu à affronter.”
“Si vous légiférez sur les jupes, elles vont venir avec des gants…”
“On a tendance en France à penser que les problèmes du fondamentalisme islamique sont des problèmes de la société française. Mais ceux qui ont assassiné les gens de Charlie Hebdo, on les a entraînés, on les a financés”, souligne-t-il. C’est pourquoi il met son camp en garde contre une “surenchère” sur les questions de l’islam et de la laïcité. “J’essaie de ne pas me laisser entraîner dans un débat émotionnel où on réagit sous la pression des islamistes. Aujourd’hui, on rentre dans leur jeu”, s’inquiète-t-il, installé sur la terrasse de son hôtel entre deux rendez-vous avec des officiels tunisiens – le président Béji Caïd Essebsi le recevra plus d’une heure. “Ce n’est pas notre société qui génère ces difficultés. C’est un problème de manipulation par des groupes extérieurs à la société française. L’objectif des islamistes, c’est de créer un climat de guerre civile en Europe, de monter les communautés les unes contre les autres. Quand une gamine fait de la provoc et que cela crée un débat national, on fait leur jeu. Il faut qu’on se calme!” Récemment, en effet, une élève de Charleville-Mézières s’est vu refuser l’entrée dans son collège pour cause de jupe trop longue. Lire aussi notre décryptage : Jupe longue au collège : le vrai du faux À droite, Sarkozy, Bertrand et Ciotti ont apporté leur soutien au proviseur. François Fillon, lui, hausse les épaules : “Et on fait quoi après? On va rendre la minijupe obligatoire à l’école ? Mais si vous légiférez sur les jupes, elles vont venir avec des gants…” Aujourd’hui, “nous avons une législation sur le voile à l’école qui fonctionne”, tranche-t-il. Contre ceux qui, à droite, “commencent à penser qu’il faut tout interdire”, François Fillon plaide pour davantage de “liberté” et de “responsabilité”. La liberté par exemple, pour les établissements scolaires qui le souhaiteraient, “d’instaurer une tenue obligatoire pour leurs élèves”. Le sujet divise profondément l’UMP, dont une partie se crispe sur la question laïque. Voulue par le patron du parti et initialement prévue mi-avril, la journée de travail sur l’islam a d’ailleurs été repoussée en juin.
“L’élection présidentielle va se jouer sur la question identitaire”
Entre un Nicolas Sarkozy qui a opté pour la ligne dure, celle qui interdirait le voile à l’université et les menus de substitution à l’école, et un Alain Juppé qui appelle au dialogue et à ne pas “exciter le sentiment antimusulman”, Fillon a choisi son camp. L’interdiction du voile à l’université, il y est hostile et il l’a dit à Nicolas Sarkozy lors du déjeuner des anciens Premiers ministres qui s’est tenu mercredi, en l’absence du maire de Bordeaux. “La police n’a pas le droit de rentrer dans les universités, rappelle-t-il. Qui serait chargé d’appliquer la loi? Les présidents d’université? Le résultat, c’est que les Français verront qu’on aura voté une loi et qu’elle ne sera pas appliquée. Tout ça, ce sont des coups sans lendemain.” Pour autant, le sujet risque d’être incontournable lors de la campagne pour la primaire de 2016. “L’élection présidentielle va se jouer sur la question identitaire”, pronostique Éric Ciotti. Dans l’avion qui les conduisait à Tunis, le président du groupe UMP au Sénat, Bruno Retailleau, a donc pressé son ami François Fillon de quitter le terrain économique pour s’emparer, lui aussi, de cette question. “Il faut qu’il investisse ce champ-là et qu’il réponde au sentiment de dépossession identitaire”, plaide-t-il. Il a été entendu. L’ancien Premier ministre planche sur le sujet dans le cadre de son projet pour 2016. Christine Ollivier, envoyée spéciale à Tunis (Tunisie) – Le Journal du Dimanche [/citation]