Cet article démontre doublement à quel point l’Occident est d’une hypocrisie morbide accentuée et aggravée par une morgue insolente. Rappelons, déjà, que l’avortement est illégal au Maroc ; du coup, toute pratique illégale de l’avortement est sanctionnée par une peine de prison, après jugement. Ceci n’a donc rien d’extraordinaire, c’est une simple application de la loi dans un pays aux traditions autres que celles en cours en Occident. Dans cet article, le journaliste veut imposer sa vision du monde au peuple marocain ! De surcroît, lorsqu’il est question, par exemple, de vraie lutte pacifique pour l’accession à la démocratie du peuple algérien qui se fait emprisonner par centaines actuellement par un régime militaire dictatorial et corrompu, il n’y a plus aucun journaliste pour en parler, pour condamner les agissements du commandement militaire et à tout le moins pour se solidariser avec les détenus d’opinion et les militants ! Par contre, dès qu’une question a trait à la sexualité ou à la femme en général, même s’il s’agit d’un ridicule fait divers, toute la presse occidentale en parle systématiquement. Mais, s’il est question d’égalité, de partage équitable des richesses, de condamnation de la corruption, de pédophilie consommée à une échelle industrielle par les touristes occidentaux…, il n’y a plus personne pour en parler. L’histoire s’en souviendra, soyez-en certains.
Une jeune femme, son fiancé, un gynécologue, sa secrétaire et une infirmière sous les verrous.
Leur crime ? Avoir pratiqué un avortement – ce qu’ils réfutent. Au-delà des faits, l’affaire Hajar Raissouni relance le débat sur l’IVG, illégal et passible de prison au Maroc, sauf si la vie de la mère est en danger. Chaque année, entre 50 000 et 80 000 avortements clandestins sont pratiqués dans le pays. Entretien avec le professeur Chafik Chraibi, président de l’Association de lutte contre l’avortement clandestin.
« Soupçonnée de relations sexuelles illégales »… Une accusation que l’on croirait venue d’un autre temps. Mais non, nous sommes bien en 2019, au Maroc.
C’est le média marocain ChoufTV qui a révélé l’information qui, depuis ce week-end, embrase les réseaux sociaux marocains et au-delà. Celle que l’on accuse de « relations sexuelles illégales » s’appelle Hajar Raissouni. Elle est journaliste et travaille pour le journal Akhbar Al Yaoum. Elle a été interpellée par la police « en flagrant délit d’avortement illégal en présence du gynécologue et d’une infirmière » le 30 août dernier, alors qu’elle se trouvait avec son fiancé dans un cabinet médical de Rabat.
Lors de sa comparution devant un tribunal de Rabat, lundi, la jeune femme a réfuté ces accusations. Hajar Raissouni a notamment déclaré au tribunal être mariée religieusement à son fiancé, un professeur universitaire de nationalité soudanaise, et attendre des documents de l’ambassade du Soudan pour officialiser l’union qui, selon la presse, devait avoir lieu dans deux semaines. Quant au praticien, lui aussi rejette la version de la police. « Nous n’avons effectué aucun avortement. J’ai procédé à une intervention urgente », aurait-il déclaré devant le juge, précisant que la journaliste était victime d’une hémorragie et avait besoin d’une opération immédiate. Des déclarations rapportées par le média en ligne Al Ayoum24, appartenant à Akhbar Al Yaoum. Le médecin est lui aussi actuellement en détention avec sa secrétaire et son assistant pour les chefs d’accusation de « débauche, avortement et participation à l’avortement ».
Selon le quotidien en ligne Yabiladi, les interpellés resteront emprisonnés jusqu’à la seconde audience, qui aura lieu le 9 septembre prochain. Le site d’information assure par ailleurs que « le dossier ne contient aucune preuve matérielle concrète de l’accusation d’avortement ».La Toile en émoi
Cette arrestation provoque une vague d’indignation, en particulier sur les réseaux sociaux. Nombreux.ses sont ceux qui y expriment leur soutien à la journaliste, les mots dièse #LiberezHajarRaissouni #SoutienHajarRaissouni circulent sur Twitter et sur Facebook.
Même ton du côté du Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (M.A.L.I) et du militant des droits humains Salah El Ouadie.
« MAROC – LE CORPS DES FEMMES N’EST PAS UNE PROPRIÉTÉ PUBLIQUE. Soutien et solidarité à la journaliste Hajar Raissouni. Soupçonnée d’avoir pratiqué un avortement, la journaliste ainsi que l’équipe médicale accusée d’avoir procédé à l’intervention ont été incarcérées. M.A.L.I. qui lutte pour la liberté des femmes à disposer de leur corps, rappelle que le droit à l’avortement est un droit fondamental. »
Un soutien est même venu d’outre-Atlantique, de la part du prince Moulay Hicham, cousin du roi Mohammed VI, installé aux États-Unis, qui qualifie cette affaire de violation des droits constitutionnels de la jeune femme.
Sur sa page Facebook, le prince dénonce une succession de faits qui se produisent « dans un pays portant le slogan de l’État de droit ». Il invoque aussi « une violation de l’esprit de nos traditions musulmanes quant à la discrétion sur les affaires personnelles des citoyens, en protection de leur honneur et contre la diffamation ».
L’avortement clandestin en question
L’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC) réclame la refonte de l’article 453 du Code Pénal. L’avortement est interdit au Maroc, excepté en cas de danger pour la santé ou la vie de la mère.
Adoptée il y a plus de deux ans par le conseil du gouvernement après l’intervention du roi du Maroc, la loi légalisant l’avortement – dans les cas de viol, d’inceste ou de malformations et maladies incurables du fœtus – peine, quant à elle, à passer définitivement. Alors même que les instructions royales ont été données, les législateurs ne semblent pas pressés. Le projet pourrait être officiellement sur la table à la rentrée parlementaire, en octobre prochain, nous apprend le professeur Chaifik Chraibi (entretien ci-dessous). On enregistre entre 50 000 et 80 000 avortements clandestins chaque année. L’interruption volontaire de grossesse non sécurisée est responsable d’environ 4,2 % des décès parmi les femmes enceintes.
Le Code pénal marocain prévoit jusqu’à 2 ans de prison pour une femme qui se fait avorter, de 1 à 5 ans pour quiconque pratique un avortement sur autrui, de 10 à 20 ans s’il y a décès de la patiente et jusqu’à 30 ans s’il y a récidive.Entretien avec Chaifik Chraibi, gynécologue, président de l’Association marocaine de Lutte contre l’Avortement Clandestin (AMLAC)
Terriennes : Comment réagissez-vous à cette arrestation ?
Chaifik Chraibi : Je la trouve totalement excessive, parce que d’habitude, lorsqu’il y a arrestation pour motif d’avortement, il faut qu’il y ait plainte d’une des parties. À mon avis, on sent le règlement de compte.
Aussi bien le médecin que la jeune femme confirment qu’elle est venue en état d’urgence d’hémorragie, donc le médecin a fait son travail. Il a donc procédé à un curetage qui semblait nécessaire, il fallait arrêter le saignement. Ce genre d’arrestations était, par le passé, exceptionnel, mais on assiste ces derniers temps à une recrudescence. Cela arrivait de temps en temps, lorsqu’il y avait plainte d’une des parties ou décès de la patiente. Conséquence : maintenant, beaucoup de médecins refusent de pratiquer des avortements. Nous sommes retournés au XIXè siècle ! On assiste à une recrudescence des avortements traditionnels, les femmes ayant du mal à trouver un médecin. Ce qui fait que nous, à l’hôpital, nous voyons arriver de plus en plus de cas de complications gravissimes, en rapport avec des avortements clandestins : délabrements génitaux, intoxications aiguës, hémorragies, etc…
Il est absolument exceptionnel, aussi, que la femme avortée se fasse arrêter. Le plus souvent, c’est le médecin et son équipe qui sont interpellés. La femme est interrogée et relaxée sur le champ.
Comment expliquer cette recrudescence d’arrestations ?Le débat sur l’avortement est très vif depuis quelques années ; il y a sans doute des raisons politiques. Il y a quelques années, les avortements étaient pratiqués sans problème, comme si on allait chez le dentiste, tout le monde fermait les yeux et y trouvait son compte.Pourquoi la loi l’interdit toujours ?Nous avons réussi à légiférer dans un certain nombre de situations : viol, inceste, malformation foetale, handicap ou grossesse à risque. Cela a été adopté par le conseil du gouvernement début 2016. Il fallu beaucoup de temps pour que le projet de loi soit discuté au Parlement. J’apprends que finalement, il a été discuté en Commission et sera étudié en plénière à la rentrée parlementaire, au mois d’octobre. Mais cela ne règle pas tout.Vous-même vous avez fait les frais de cette situation, pour l’avoir dénoncée…J’ai participé à un reportage de France 2 sur ce sujet en décembre 2014. J’ai montré les enfants abandonnés, les femmes qui avortent dans des conditions sanitaires. Au lendemain de la diffusion du reportage, en janvier 2015, j’ai été démis de mes fonctions de chef de service obstétrique au CHU de Rabat. Je continue aujourd’hui d’exercer dans le même hôpital. On y pratique des avortements lorsqu’il y a des situations d’urgence pour la santé de la femme. Les femmes qui veulent interrompre leur grossesse sont obligées de le faire clandestinement ou à l’étranger. Cela a un coût. Au Maroc, il faut compter entre 500, 800 voire 1000 €. Plus c’est devenu restrictif, plus les tarifs augmentent. Et beaucoup de médecins refusent de le faire, car il y a de plus en plus d’arrestations.
Les femmes des milieux défavorisés, elles, ont recours à l’avortement traditionnel ou à l’herboristerie. On voit aussi de plus en plus d’enfants abandonnés, elles finissent par accoucher et “jeter” leur enfant soit vivant soit mort, les orphelinats sont pleins d’enfants abandonnés. Nous avons beaucoup régressé.
Il est aussi difficile de comptabiliser le nombre de médecins en prison pour IVG, car j’ai enquêté dans le milieu pénitentiaire. Sur les bordereaux, il est noté qu’ils sont détenus pour droit commun, et non précisément pour avortement.
On aura beau fermer les yeux, on n’a pas le choix, il faudra arriver à légaliser l’IVG.
Hajar Raissouni, interpellée à Rabat avec son fiancé alors qu’elle était chez son gynécologue, est accusée d’avortement, ce qui reste illégal au Maroc, sauf exception. Ici en selfie sur sa page Facebook. ©Facebook/HajarRaissouni
TV5 Monde4 septembre 2019