L’État va se retrouver devant un dilemme très complexe à gérer au vu des derniers scandales en matière de vaccination. Effectivement, suite à la décision du conseil d’État qui contraint l’État à fournir le seul vaccin obligatoire c’est-à-dire le DTP sans aucune valence supplémentaire, deux possibilités totalement contradictoires s’offrent à lui.
Celle qui sera dictée par le lobbying acharné de Big Pharma, en imposant les autres valences ce qui irait à l’encontre de la défiance populaire actuelle. Ou tout simplement, ce qui serait plus logique et sage, lever cette obligation vaccinale qui ne présente plus aucun intérêt de santé publique étant donné que d’autres pays européens importants – Allemagne, Espagne, Autriche, Pays-Bas, Danemark – n’en sont pas astreints alors même que les taux de vaccination sont élevés et, chose plus importante, les maladies ciblées par le DTP c’est-à-dire la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite ont été éradiquées et ont quasiment disparu.
Vous imaginez tous que cette question est cruciale pour l’industrie et que les petits rats de couloir vont beaucoup s’agiter ces prochaines semaines afin d’imposer et de défendre leurs intérêts économiques au détriment de la santé publique en comptant sur la complicité de politiciens et de professionnels de santé corrompus.
Mercredi, le Conseil d’État a demandé au gouvernement de permettre l’accès aux vaccins obligatoires, sans qu’ils ne soient associés à d’autres produits.
Une démarche impossible, selon l’ex-président du Conseil technique des vaccinations, mais qui ouvre la voie à une suspension de l’obligation vaccinale.
Les vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite sont les trois seuls obligatoires chez les nourrissons à ce jour en France. Or, le produit qui les regroupe, le DT-Polio (ou DTP), ne se vend plus seul depuis 2008 et est dorénavant associé à d’autres vaccins, dont l’usage est seulement “fortement recommandé” par le Haut Conseil de la santé publique. Cette situation devrait bientôt changer, puisque dans une ordonnance rendue publique mercredi, le Conseil d’État, saisi par 2300 requérants, a “enjoint au ministre chargé de la Santé de prendre des mesures pour rendre disponibles des vaccins correspondant aux seules obligations de vaccination”.
En clair, les vaccins obligatoires doivent être disponibles seuls, c’est-à-dire sans être associés à des produits seulement recommandés. L’État a six mois pour respecter la volonté du Conseil d’Etat. Cette décision pourrait surtout mener à une suspension des vaccins obligatoires, explique à L’Express le professeur Daniel Floret, pédiatre et ancien président du Conseil technique des vaccinations.
Le décision du Conseil d’État est-elle applicable dans les six mois?Pr. Daniel Floret: Il est absolument impossible que le gouvernement puisse remettre à disposition le vaccin DTP, il n’est plus fabriqué nulle part. Ce produit visait une frange limitée de la population, car il était seulement utilisé par les anti-vaccination et ne concernait que 2 à 3% des enfants [soit 16 000 à 24 000 cas, sur les 800 000 naissances annuelles].
De toute façon, le laboratoire Sanofi qui le produisait jusqu’en 2008 n’a plus la chaîne de production appropriée. Il ne va pas remonter une chaîne, pour un vaccin utilisé seulement en France et pour quelques dizaines de milliers de cas. Et même s’il décidait de reprendre sa production, il faudrait la faire valider, puis se lancer dans des essais cliniques… Cela prendrait un temps fou.Alors quelles sont les options qui s’offrent à l’Etat, pour respecter la volonté du Conseil d’État ?
L’État peut étendre l’obligation vaccinale à tous les produits utilisés actuellement [C’est l’option privilégiée par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui a indiqué dans un communiqué que “le cadre législatif actuel” de la politique vaccinale “pourrait évoluer”]. Mais cela me paraît difficilement possible à être mis en oeuvre dans les prochains mois et par le gouvernement actuel, car il faut faire voter une loi et la session parlementaire se termine prochainement. L’autre option, la plus probable selon moi, est de suspendre l’obligation vaccinale.
INTERVIEW >> “L’arrêt de la vaccination obligatoire est inéluctable” [ici]
Nous l’avons déjà préconisé dans un rapport publié en novembre 2016 [ici]. Cette suspension se fait par un simple décret et elle a l’avantage d’être levée, si besoin, par la signature d’un second décret. L’État l’a déjà fait en juillet 2007, en levant par décret l’obligation de vaccination par l’antituberculeux BCG chez les enfants de moins de 6 ans.
Pourquoi, selon vous, faut-il suspendre l’obligation de vaccination du DTP?
Cette obligation date d’il y a plusieurs dizaines d’années: le vaccin contre la diphtérie a été imposé en 1938, celui contre le tétanos en 1940 et contre la poliomyélite en 1964… A ce moment là, ces maladies étaient très graves et la population se montrait peu motivée dans le domaine de la santé. Mais aujourd’hui ce sont des maladies peu fréquentes, qui ont même quasiment disparu. Il faut évidemment continuer à vacciner les enfants contre ces maladies, mais l’obligation n’est plus une nécessité.
Il y a des pays comme l’Allemagne, l’Espagne, l’Autriche, les Pays-Bas ou encore le Danemark qui n’ont jamais rendu aucun vaccin obligatoire, qui fonctionnement donc uniquement avec des recommandations et qui n’ont aucun problème avec ces maladies.
Ne craignez-vous pas une chute du taux de vaccination?
Aujourd’hui, 90% des nourrissons sont vaccinés. Il n’y a pas de raison que cela change, même s’il n’y a plus de vaccins obligatoires. A titre d’exemple, neuf enfants sur 10 sont actuellement vaccinés contre les infections à pneumocoque, alors que la démarche est seulement recommandée.
Si on suspend les obligations vaccinales, il faudra toutefois que l’Etat lance une compagne d’information chez les médecins. C’est l’opinion du médecin traitant qui détermine le plus l’acte de vaccination chez les enfants. Il faut que les professionnels puissent expliquer aux parents pourquoi ils le font et pourquoi c’est important de le faire. Discuter avec […]
Iris Péron – L’Express