Il faut dire que Bernard Tapie aura fait du mal à la France et qu’il continuera à en faire même après sa mort. Non seulement l’arbitrage a été ultra favorable mais la fiscalité du montant octroyé semble avoir été encore plus favorable ! Sauf que M. Éric Woerth sera jugé par la CJR qui n’a rien à voir avec le droit commun et qui avait, dans le cadre justement de cette affaire Tapie, rendu un jugement plus que troublant, voire déconcertant à l’encontre de Christine Lagarde ! De plus, il n’y aura pas de jugement avant au moins 5 ans vu la lenteur ahurissante de la justice française !
Le ministre du budget de François Fillon est soupçonné d’avoir accordé un avantage fiscal à Bernard Tapie en 2009.
Voilà que de nouveau, Éric Woerth, ancien ministre devenu député (LR) et président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, se retrouve devant la Cour de justice de la République (CJR). Cinq ans après l’affaire de l’hippodrome de Compiègne – l’histoire d’une vente de parcelles de terrain controversée, pour laquelle il avait obtenu un non-lieu de la CJR, fin 2014 – l’ex-ministre du budget de François Fillon est sous le coup d’une nouvelle enquête de cette juridiction, seule compétente pour juger les actes et décisions des membres de gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions.
Il s’agit cette fois de l’affaire Tapie et plus particulièrement du traitement fiscal avantageux appliqué, en 2009, aux 403 millions d’euros que venait alors d’obtenir l’homme d’affaires Bernard Tapie dans le dossier Adidas, l’année précédente, au terme du fameux arbitrage controversé qui l’avait opposé au Crédit lyonnais.
Enquête ouverte
Comme le confirme une source judiciaire après des révélations du Parisien le 11 juillet, la CJR a ouvert, en juin, une enquête visant Éric Woerth pour de possibles faits de « concussion » – le terme employé pour des malversations commises dans l’exercice d’une fonction publique – à cette occasion. La CJR cherche à savoir si M. Woerth, alors en poste au budget, n’aurait pas accordé un avantage fiscal indu à l’homme d’affaires.
En fait, cette enquête ouverte il y a « environ un mois » par la Cour de justice de la République découle elle-même de l’ouverture, en mars 2016, au parquet de Paris, d’une information judiciaire pour « concussion, complicité et recel » sur ce coup de pouce fiscal – une information judiciaire toujours en cours, mais qui vient donc d’être disjointe, afin que le rôle de M. Woerth puisse être examiné par la CJR, conformément aux textes. Toujours selon Le Parisien, le parquet de Paris aurait d’ailleurs récemment prononcé une mise en examen dans cette affaire, visant « un membre du cabinet d’Éric Woerth ».
Les faits, qui remontent donc à 2009, avaient été révélés par Libération, en 2013. Le quotidien avait raconté comment Bernard Tapie, recevant ses 403 millions d’euros, dont 45 millions net d’impôt, avait souhaité que l’indemnité principale soit taxée comme une plus-value (à 1,67 %), face à une administration fiscale voulant appliquer l’impôt sur les sociétés (33,3 %).
Cadeau sur deniers publics
Selon Libération, après un long affrontement, le fisc avait soumis deux options au ministre : l’application stricte du droit, soit une facture fiscale de 100 millions d’euros ; ou une transaction à 72 millions avec Tapie, afin d’éviter qu’il ne conteste la facture en justice. Or, le 2 avril 2009, Éric Woerth avait choisi le second projet, en l’améliorant encore pour descendre à 11,2 millions d’euros d’impôts… octroyant à Bernard Tapie un cadeau fiscal substantiel, sur deniers publics.
Puis en novembre 2015, un rapport de Gilles Johanet, alors procureur général de la Cour des comptes, avait mis le feu aux poudres. S’interrogeant sur « les conditions très favorables d’imposition » accordées à Bernard Tapie, le haut magistrat avait accusé Éric Woerth d’avoir offert à Tapie une « exonération fiscale » de plusieurs dizaines de millions d’euros, « en violation des textes légaux et réglementaires ». « Le juge pourrait considérer que certaines des personnes qui sont intervenues sur ce dossier ont cherché à s’affranchir intentionnellement des textes applicables (…) », écrivait-il dans ce document transmis à Bercy puis à la justice. S’en était suivie l’ouverture de l’enquête au parquet de Paris.
Ainsi, dix ans après les faits, cette affaire dans l’affaire – l’octroi d’un cadeau fiscal à Bernard Tapie, en plus d’un arbitrage déjà ultrafavorable – finit par rattraper Éric Woerth. Un ex-ministre dont le sort doit être tranché par la commission d’instruction de la CJR, composée de trois magistrats de la Cour de cassation…
Photo d’illustration : photo d’archive prise le 8 novembre 2010 à Garges-les-Gonesse montrant le ministre du Travail, Éric Woerth. (Photo Fred DUFOUR / AFP)