Voici une traduction plus ou moins fidèle des propos tenus sur le site arabophone d’Al-Jazeera par le Docteur Shinquitti, un ancien proche et soutien de Monsieur Tariq Ramadan qui refuse désormais de le soutenir, car son cas n’est plus défendable au niveau de l’éthique et de la morale islamique. Il appelle les musulmans à la raison en leur demandant de cesser de crier au complot car le comportement du prédicateur helvète est catastrophique et dure depuis plusieurs décennies. Cet article marque le début de la fin du soutien des intellectuels arabes à l’escroquerie ramadanienne et c’est une bonne chose.
Personne n’a encore raconté l’histoire de l’ascension et de la chute de Tariq Ramadan. Le but de cet article est de présenter le plus clairement possible l’histoire de ses hauts et ses bas, sans aucune justification ni ambiguïté.
Il faut reconnaître que j’ai hésité pendant longtemps à publier cet article. J’étais réticent à le faire. Mon article est resté longtemps dans mon ordinateur avant que je décide sa publication.
Ce n’est pas parce que je n’étais pas convaincu de son contenu, ni de ma crainte de le publier, mais bien parce que mon soutien à Tariq Ramadan est ancien et je le respecte.
Je publie aujourd’hui car cela fait partie de la responsabilité légitime et morale d’une personne qui connaît Tariq Ramadan et son cas de près, car il est aussi de mon devoir de conseiller les imams et ma communauté. Les nombreuses réactions de tant de musulmans qui n’ont pas une connaissance suffisante et réelle de cette affaire m’attriste aussi profondément.
Une des raisons pour la publication tardive de l’article est aussi que je n’ai pas trouvé moral de publier une condamnation morale d’un homme encore en prison, d’autant plus que son emprisonnement n’avait aucune nécessité ni justification légale convaincante.
Tariq Ramadan a récemment obtenu une liberté temporaire, il est en mesure de se défendre devant les tribunaux et de discuter avec ceux qui le critiquent ou le condamnent.
J’ai suivi l’affaire Tariq Ramadan dans les médias français depuis le début de l’année dernière, et j’ai publié un article dès les premiers jours de l’affaire, intitulé : « La trahison culturelle et le sort du Dr Tariq Ramadan » le 31 octobre 2017, et j’avais alors défendu avec vigueur Tariq Ramadan.
Par conséquent, mes lecteurs, qui ont lu ma défense de Tariq Ramadan il y a un an, ont le droit de lire mon opinion aujourd’hui, après que les dernières révélations qui m’ont surpris et attristé, et qui ont surpris et attristé des millions de musulmans.
Les sympathies pour Tariq Ramadan étaient nombreuses :
Premièrement, il est le descendant d’une famille musulmane connue de longue date dans l’engagement islamique qui a porté très haut le message de l’islam.
Tariq Ramadan, lui-même, portait la voix des valeurs de l’islam et il en était son défenseur devant des adversaires farouches à des moments où on entendait peu de gens.
Fils du Shaykh Said Ramadan, l’un des pionniers du travail islamique en Europe et le fondateur du Centre islamique à Genève, il est le petit-fils de l’Imam Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans, le principal mouvement de réforme islamique contemporain.
Tariq a mené de féroces batailles intellectuelles et médiatiques contre les intellectuels, les médias et les politiciens les plus célèbres.
Il y a environ 15 ans, le 3 octobre 2003, Tariq a publié un article que les grands journaux français ont refusé de publier, notamment Le Monde et Le Figaro, attaquant ceux qu’il qualifiait d’« intellectuels communautaires ».
Ce sont des intellectuels sionistes français, connus pour leur défense des droits humains dans le monde tout en évitant toute critique d’Israël. Parmi ceux-ci figurent de nombreux intellectuels sionistes français.
Dans l’article, Tariq Ramadan a accusé les intellectuels aux valeurs humaines universelles de se taire devant les droits du peuple palestinien et les atrocités commises par Israël , ainsi que le soutien qu’ils portaient à l’invasion américaine de l’Irak.
Depuis la publication de cet article, la campagne coordonnée contre Tariq Ramadan a débuté, ce qui a conduit à dégager un consensus parmi l’élite politique, intellectuelle et médiatique française pour diaboliser l’homme.
Cette campagne a été rejointe par les forces de l’extrême-droite française, hostile à la présence croissante de l’islam en France et dans toute l’Europe, et par les forces laïcardes françaises qui ont des comptes à régler envers toutes les religions, et en particulier l’islam.
Les journalistes français étaient connus et reconnus pour leurs attaques incessantes à l’encontre de Tariq Ramadan. L’une des personnes les plus féroces était Caroline Fourest, l’auteur de l’ouvrage « Frère Tariq ».
Sous une atmosphère islamophobe permanente, les musulmans français, ayant perdu confiance en eux-mêmes, se reconnaissaient dans le personnage « Ramadan » sur-médiatisé et constamment diabolisé .
Ce sont donc ces milieux islamophobes, à travers leurs attaques incessantes, qui ont poussé des millions de musulmans à sympathiser avec Tariq Ramadan : il est d’une descendance illustre et il était devenu le défenseur d’un islam qu’on veut rendre invisible et il symbolisait sur un plateau télé toutes les rancunes et les adversités que vivaient les musulmans dans leur quotidien.
Lorsque les premières révélations ont été faites, cela a été une surprise, un choc et une immense tristesse auprès de ses partisans, et auprès de nombreux musulmans qui ont mis toute leur confiance en cette personne instituée comme modèle et comme inspiration pour les jeunes musulmans.
Tariq Ramadan menait une vie parallèle, loin des exigences de la vertu islamique.
Ce que j’exprime ici, ce sont des données solides tirées des confessions de Tariq Ramadan, ou documentées par des preuves matérielles irréfutables, et je ne dirai rien de plus de ce qui a été déjà révélée dans tous les médias français et qui se sont avérés vrais. Ces données solides révélées au cours de l’année écoulée sont les suivantes :
1/ Tout d’abord, la justice belge a révélé il y a quelques mois qu’un accord juridique a effectivement été conclu en 2015.
Tariq Ramadan a bien payé vingt-sept mille euros à l’une de ses maîtresses, en échange de la suppression de ce qu’elle a publié sur le web pour prouver sa relation intime.
Une affaire qui a été discrètement réglée a l’époque devant les tribunaux belges bien avant que toute accusation soit portée contre Tariq Ramadan devant les tribunaux français, suisses et américains.
Ceux qui étaient désireux de défendre Tariq Ramadan dans le passé – et je suis l’un d’eux – ont aujourd’hui le droit de refuser de poursuivre leur soutien devant de tels faits et de tels mensonges avérés.
2/ Les affirmations de l’avocat de Tariq Ramadan (Emmanuel Marsigny) au cours des derniers mois dans les médias français qui admet l’existence de « relations sexuelles » avec les plaignantes qui accusent Tariq Ramadan de viol.
Tariq Ramadan n’a démenti aucun des aveux faits par son avocat, il a même félicité l’avocat pour la gestion de son dossier judiciaire dans sa première déclaration, après sa libération de prison il y a quelques jours.
Tariq n’a pas contesté les extraits de ses aveux publiés dans les journaux français.
3/ L’avocat de Tariq Ramadan a révélé à la justice des centaines de photos et vidéos qui prouvent que les relations sexuelles avec l’une des plaignantes sont bien consenties. Cette femme est une call-girl, une « professionnelle » connue dans le scandale de l’hôtel Carlton Impliquant l’ancien directeur de la Banque mondiale, Dominique Strauss-Kahn.
Les deux premiers plaignantes, qui ont aussi eu des relations sexuelles avec Tariq Ramadan d’après ses aveux, sont également connus pour leur animosité envers l’islam de France.
La relation de Tariq Ramadan avec ces trois femmes indique que dans cette affaire, nous ne sommes pas face à une « négligence » ou à des « faiblesses humaines » liées à un contexte particulier, mais plutôt à une constante intention et une détermination évidente et répétitive.
Il faut souligner ici que cela n’est pas une preuve juridique qui confirmerait les accusations de viol contre Tariq Ramadan dans des tribunaux, mais cela prouve seulement que Tariq Ramadan, d’un point de vue de l’éthique islamique et selon les dispositions liées à la Jurisprudence musulmane, que les actes qui ont été commis sont non seulement illicites, mais que cela dénote d’une personne « accro » au sexe, avec un mépris pour les personnes abusées et usant de la tromperie envers les musulmans.
Vu que ces relations illicites ont été commises avec une multitude de femmes, et que ces relations se sont poursuivies durant de nombreuses années, nous ne sommes pas en face d’une faiblesse temporaire ou accidentelle, nous ne sommes pas en face d’une personne qui a succombé comme cela peut arriver à tout musulman qui, par la suite, prenant conscience de sa faute, se repent.
Nous sommes plutôt en face d’une personne atteinte de maladies chroniques et en situation de dépendance sexuelle.
Comme un ami informé de l’affaire me l’a précisé : « on peut accepter si nous étions en présence de quelques relations illicites, la faiblesse humaine peut trouver une certaine compréhension et des regrets. Dans notre situation, il semble être dans une dépendance, car ses actes s’étendent sur une période de peut-être plus de 20 ans… Cela ne peut s’expliquer que par le fait que Tariq Ramadan souffre d’un dérèglement psychologique et de double langage, ce qui l’a complètement détruit. »
Sur la base de ces données solides révélées au cours d’une année de rebondissements juridiques et médiatiques, nous pouvons émettre les conclusions suivantes :
1/ Il n’est pas possible de reprocher à des millions de musulmans de s’être laissé tromper par M. Ramadan et son discours islamique et moral.
Dans les ouvrages traitant de la biographie d’Abdullah bin Omar, ce dernier affirmait : « Quiconque nous a séduits en utilisant la Parole de Dieu a été lui-même séduit. »
Il n’a pas été facile de tromper Abdullah bin Omar, mais il était attaché à ce que Dieu Tout-Puissant avait décidé de laisser apparaître à Ses créatures. Il ne jugeait que sur les apparences que Dieu lui permettait de voir et il refusait d’aller au-delà.
Et nous, nous ne nous attendons pas à ce que ceux qui ont été trompés par les apparences de Tariq Ramadan soient plus perspicaces qu’Abdullah ibn Omar.
Ceux qui étaient désireux de défendre Tariq Ramadan dans le passé – et je suis l’un d’eux – ont le droit de refuser de poursuivre leur soutien vu la manière dont ils ont été utilisés et trompés.
2/ Tariq Ramadan porte seul la responsabilité de son comportement immoral. On ne peut en porter conséquence sur sa famille, ou sur toute personnalité politique ou universitaire qui, de bonne foi, l’a défendu sur la base de l’apparence de sa vie publique.
Toute personne est innocente par défaut jusqu’à preuve du contraire. Il incombe d’abord aux accusateurs d’apporter les preuves de leurs accusations. Ne penser que du bien de son prochain est une des valeurs éthiques en Islam qu’il nous faut toujours respecter.
Et il est préférable, en Islam, de tomber dans l’erreur en toute bonne foi que de soupçonner son prochain en permanence sans apporter la moindre preuve de ses suspicions.
3/ Ceux qui étaient désireux de défendre Tariq Ramadan dans le passé – je suis l’un d’eux – devraient refuser de poursuivre leur soutien, vu la situation. Il est de notre devoir envers ceux qui ont défendu Tariq, ainsi que les nombreuses personnalités et organisations musulmanes à ses côtés, de leur exposer les faits avérés qui se sont présentés à nous, sans exagération ni dénaturation.
4/ Tout cela ne dispense pas les musulmans de continuer à combattre ceux qui ont exploité cette affaire pour dénaturer notre religion dans le cœur des gens et de propager leurs préjugés à l’égard des minorités musulmanes occidentales. Il faut continuer à affronter ces odieux détracteurs. Ceux qui ont exploité l’affaire Tariq Ramadan de cette manière sont connus pour leur hostilité à l’égard de l’islam. Ils sont dans les courants laïcards jusqu’aux sionistes français, de la droite française extrémiste jusqu’aux contre-révolutionnaires arabes.
5/ L’une des grandes leçons de tout cela est que nous n’avons pas à incarner l’Islam en une personne, aussi bonne soit-elle. L’islam est avant tout et au-dessus et au-delà. Le calife Ali Abi Talib (qu’Allah soit satisfait de lui) a déclaré : « Je connais les hommes en vérité et je ne connais pas la vérité à leur sujet. » Et les prophètes, que la paix soit sur eux, sont ceux que Dieu a établis comme modèles pour les hommes, et ce ne sont qu’eux qui ont gardé l’infaillibilité dans la direction des gens.
On peut donc comprendre que les autres Hommes soient plus enclins à l’erreur, au péché et à la tentation.
En bref, Tariq Ramadan était un édifice intellectuel respecté. Mais cet édifice s’est effondré devant nos yeux. Et c’est Tariq Ramadan lui-même qui en est responsable et personne d’autre. Il est regrettable que certains le place toujours dans un rôle de victime et provoque chez les musulmans de la passion et de la solidarité qui ne lui sont pas dues.
C’est une erreur de décrire cette affaire comme un complot et une guerre contre la religion de l’islam.
Nous devons être avec la vérité, même s’il faut en souffrir. Être avec la vérité, c’est être avec Dieu, et quoi qu’en pensent les gens ou nos détracteurs.
Arrêtons de manipuler la naïveté des musulmans et de les impliquer dans une bataille perdue.
Il n’y a aucun doute sur l’existence de guerres contre l’islam et de complots à son encontre à plus d’un endroit sur la planète.
Mais la plus grande guerre contre l’islam, et la conspiration la plus dangereuse contre lui, consiste à porter la bannière de la propagation de la vertu d’être immergé dans le vice.
Nous demandons à Allah de nous accorder le pardon et le bien-être, le pardon et la sincérité dans nos paroles et dans nos actes.
Dr. Shinquitti.