La question est double : pourquoi cet émir offre-t-il une somme si importante à une commune française déjà très riche au lieu de la donner à des paysans africains, asiatiques ou sud-américains pauvres, afin d’améliorer réellement leur quotidien ?! Secundo, pourquoi se poser maintenant une telle question alors que la France a déjà accepté des milliards de la main de ces émirs de pacotille ? Le divorce de l’ex-président Sarközy n’a-t-il pas été financé par le Qatar ? Quelle belle bande d’hypocrites…
L’ancien émir du Qatar a fait don d’un million d’euros à une commune près de Cannes. Cette générosité alimente les rumeurs et assombrit le climat politique local.
À Mouans-Sartoux, près de Cannes, tout le monde ne parle plus que de cela : l’ex-émir du Qatar le cheik Hamad Ben Khalifa al-Thani, qui possède ici une résidence secondaire, a signé un chèque d’un million d’euros à cette petite commune de 10.000 âmes. Depuis, c’est la zizanie au village.
« La question qu’on pourrait se poser, c’est en échange de quoi ce don a été effectué ? », s’interroge prudemment Pierre, un retraité d’EDF. Dominique, une esthéticienne de 58 ans, est persuadée de son côté que l’ancien émir, résident depuis 1995 sur la colline de Castellaras, a bénéficié, au minimum, de « facilités » en matière d’urbanisme et trouve ce don « intrinsèquement inadmissible ». Aurélie, 43 ans, chef de projet dans les télécoms, estime, elle, que « lorsque les gens vous donnent de l’argent, on ne va pas leur dire non, quand même ! ». Seule chose sur laquelle tout le monde semble s’accorder : les Qatariens, personne ne les a jamais croisés dans les rues du village.
Le sujet agite aussi le microcosme politique. « Ce n’est pas ma conception de la République française, tance Christophe Chalier, tête de file (LR) de l’opposition et suppléant de la député maire du Cannet Michèle Tabarot. On n’accepte pas que des fonds étrangers financent l’école ou ce qu’il y aura demain dans l’assiette de nos enfants. » Et de citer la délibération municipale qui précise que l’intention du généreux donateur est de « soutenir la commune dans le développement de son action en faveur de l’éducation et de l’alimentation durable ».
À l’hôtel de ville, le premier magistrat ne bronche pas. « L’an dernier, l’émir et sa femme ont visité notre ferme communale qui fournit en légumes bio les cantines de nos crèches et de nos écoles, raconte l’écologiste sans étiquette Pierre Aschieri. Ils voulaient voir comment nous procédions, ils étaient très intéressés. » Et c’est à la suite de cette visite que le don aurait été décidé. Il sera, selon M. Aschieri, intégralement consacré à la « réhabilitation de la ferme communale et des restanques » de ce terrain de 6 hectares.
Geste désintéressé
Par le passé, alors qu’il était encore émir, le cheik al-Thani avait déjà fait preuve de prodigalité en versant plus de 200.000 euros pour la construction d’une caserne de pompiers à Mouans-Sartoux. Les mauvaises langues remarquent, au-delà du geste désintéressé, que la colline où demeure l’ancien souverain est très exposée aux incendies. Surtout, plusieurs administrés des Alpes-Maritimes ne peuvent s’empêcher de faire le lien entre des « facilités » qui auraient été accordées à l’émir et sa générosité récurrente.
En 2003, un an après le don destiné aux soldats du feu, la famille qatarienne obtient ainsi, pour un euro symbolique, un tronçon de chemin communal « délaissé » pour réunir deux de ses terrains. L’an dernier, elle a été autorisée à percer, à ses frais, un tunnel sous la route, pour relier deux dépendances. Il faut dire que depuis 1995 et l’achat d’une première propriété, le domaine qatarien s’est bigrement agrandi et couvre désormais, sur la colline qui domine toute la plaine de Mouans-Sartoux, plus de 30 hectares, avec neuf villas, huit piscines, un héliport et une salle de sport dernier cri.
« C’est vrai que le percement d’un tunnel n’est pas une chose courante, admet M. Aschieri, mais toutes les règles d’urbanisme ont été respectées, il n’y a jamais eu de passe-droit, et le reste, c’est le jeu politique.» Et d’ouvrir le quotidien local de la veille qui rapporte justement, quelques pages après « l’affaire » de Mouans-Sartoux, le repas de Noël offert il y a quelques jours aux seniors du Cannet par « son altesse Karim Aga Khan IV ». Une table d’hôte de pas moins de 800 convives perpétuant une tradition instaurée par la Bégum, elle aussi une […]
Vincent-Xavier Morvan – Le Figaro