La cause de tous nos malheurs, de toutes nos peines, de toutes nos souffrances et de toutes nos colères, c’est l’illusion, les illusions auxquelles nous donnons crédit, nos illusions.
Croire que l’Exécutif ne peut que nous vouloir du bien jusqu’à ne pas pouvoir concevoir qu’il puisse nous vouloir du mal relève de la plus phénoménale illusion.
S’attaquer à ceux qui profitent de nos illusions pour nous abuser, c’est bien. S’affranchir de nos illusions c’est mieux.
La plus terrible illusion c’est de croire qu’on n’en a pas.
La colère la plus inouïe sera toujours une colère contre nos illusions.
Il y a un moyen infaillible pour savoir si on n’a plus d’illusion : quand nous n’avons plus d’illusions nous sommes dans la béatitude complète inaltérable.
Dieu n’a pas d’illusion ; quand nous n’en avons plus, nous faisons un avec Lui.
Voilà le sens de l’existence humaine : s’affranchir de toute illusion.
Vouloir briser une illusion c’est être encore dans l’illusion.
L’illusion a tellement d’emprise sur nous qu’elle réussit à se faire passer pour la réalité.
L’homme ordinaire craint la mort sans comprendre qu’il ne craint que la mort de ses illusions.
Le monde visible n’est rien d’autre que des illusions fossilisées, à divers degrés de fossilisation. Une pierre est bien plus fossilisée qu’une goutte d’eau.
Finalement, la seule chose qui ne soit pas fossilisée c’est notre pensée. Pour peu qu’elle soit libre. Une pensée dogmatique est déjà fossilisée.
La science aujourd’hui a pris une telle tournure qu’elle fossilise la pensée.
Un robot c’est l’aboutissement de la pensée fossilisée.
Le monde visible est un gouffre sans fond peuplé de fossiles d’illusions, et ce gouffre lui-même est une illusion.
Aspirons bien plus qu’à une pensée libre, aspirons à une pensée vivante. Car la pensée vit, et elle vit bien plus que notre corps. Elle pourrait même vivre indépendamment de notre corps d’illusions si seulement nous voulions nous en affranchir.
Toute croyance naît d’une illusion, excepté la croyance en une perspective, un but.
Au fond, tout bien considéré, croire en une perspective ce n’est pas seulement y croire, c’est déjà la dessiner avec la pensée, c’est déjà l’accomplir.
Une perspective qui s’accomplit jusque dans le monde visible commence déjà à se fossiliser.
Réaliser ses rêves, son destin, c’est, entre autres, accepter qu’ils se fossilisent.
La Croix du Christ est le fossile de son destin accompli.
Un livre c’est déjà une pensée fossilisée à un certain degré.
Tout livre est un fossile de la pensée, même le Coran, la multitude délirante des interprétations de ce livre le prouve aisément.
La plupart des musulmans sont des idolâtres qui adorent un fossile en le parant de toutes les fantaisies de leur interprétation, tel un totem. Le littéralisme étant l’interprétation la plus délirante.
Si Dieu se manifestait aux musulmans dans tout son vivant éclat, il n’y aurait plus aucunes interprétations !
Remonter ésotériquement, librement et honnêtement jusqu’à la source vivante en amont du Coran jusqu’à soumettre tous les dogmes de celui-ci à l’épreuve de la vérité et à en sacrifier le cas échéant sur l’autel de la seule vérité, est plutôt rare chez les musulmans, voire rarissime.
L’harmonie et la justice divines se fossilisent dans les religions, les lois des religions, leurs rites, leurs rituels.
Pour bien juger un homme, il faudrait connaître entièrement son passé, son karma ainsi que toutes ses vies antérieures… quel juge peut avoir une telle connaissance ?…
L’homme ne peut commencer à apprendre qu’en observant les fossiles, en les considérant comme tels.
Les fossiles ne sont pas le siège de la vérité ils n’en sont que des traces. Prendre les traces pour le siège, voilà en quoi consiste le dévoiement de la science, ou des religions. La science moderne n’étant tout compte fait qu’une religion parmi d’autres, la plus perverse, la plus sadique, la plus fanatique, la plus démentielle des religions…
La joie de l’amour qui ne se fossilise pas, voilà une définition de Dieu.
On pourrait croire que la matière est une fossilisation complexe d’illusions mais si cette complexité n’était elle-même qu’illusoire…
L’amour divin c’est aussi l’amour du jeu, du grand jeu des illusions, sans se prendre au jeu. L’homme ne comprend rien à ce jeu, il prend ce jeu pour le « je », et se prend littéralement au « je », plongeant alors dans un sinistre égarement.
La chute de Lucifer c’est la chute d’un clair et in-nocent jeu divin dans le confus et nocent je.
Le je ne joue plus innocemment, il joue mal, très mal, jusqu’à haïr le jeu divin – le jeu de la mort et de la naissance -, jusqu’à haïr la mort, jusqu’à vouloir faire vivre le je éternellement, mais ce je n’est qu’une confluence d’illusions nouées moralement, confluence périssable. Malgré toutes les promesses du Serpent de la connaissance, le je ne peut donc rien connaître, rien savoir, si ce n’est qu’il n’est qu’une confluence d’illusions qui se dissoudra inexorablement dans le grand jeu des illusions. La sagesse consiste à vouloir cette dissolution, à vouloir innocemment vivre la joie éternelle de cette dissolution, et à lâcher cette coupable servitude, cette servitude-totem du vouloir-vivre de ce je périssable, servitude admirablement décrite par Schopenhauer.
La science est devenue le totem de nos coupables servitudes, dont il fait nos certitudes ; le totem des promesses du Serpent de la connaissance, tant promue par la kabbale juive.
La science devenue totem, la quête de vérité devient tabou, et la bestialité médiatique s’empresse de sacrifier tout élan de vérité sur l’autel doré des petits arrangements…
« Que puis-je connaître ?», s’interrogeait Emmanuel Kant dans la préface de sa Critique de la raison pure. Voici ma réponse : le « je » ne peut rien connaître excepté savoir qu’il est voué à sa dissolution inexorable.
« Que dois-je faire ?», s’interrogeait encore Kant. Ma réponse : le « je » doit se taire complètement pour écouter l’altérité divine.
« Que m’est-il permis d’espérer ?», questionnait enfin Kant. Ma réponse : la joie de la dissolution de ce « je » qui questionne.
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