Avec les ronds-points, la France est aussi accro à ses gares TGV. Ce sont 230 quais dans tout l’hexagone qui sont desservis par des lignes à grande vitesse. Seulement, la SNCF se retrouve aujourd’hui dans une impasse financière où les dettes s’accumulent.
Ainsi, Les Échos nous informaient en octobre dernier que la question de réduire le nombre de gares desservies par le TGV s’était retrouvée dans la lettre de mission de Jean-Cyril Spinetta, chargé par le gouvernement de préparer la refondation du système ferroviaire.
Dans le même temps, la question reste épineuse car même si les lignes à grandes vitesse ne totalisent que 1% des déplacements, beaucoup d’élus locaux se battent pour obtenir des arrêts dans leur ville afin de stimuler le développement.
Dans ce contexte, la légitimité de la construction d’une seconde gare près de Montpellier alors que l’agglomération est déjà desservie interpelle.
142,7 millions d’euros pour 4 TGV par jour
La gare de la Mogère a vu passer son premier train de fret en décembre dernier. Et comme le slogan le souligne, « un train en cache souvent un autre », le premier TGV devrait arriver en juillet prochain.
Quand on se réfère au discours officiel, la légitimité de cette construction ne fait aucun doute. D’abord, il s’agit d’une ligne de contournement entre Nîmes et Montpellier, permettant à deux tiers des trains de marchandises empruntant la voie classique de désengorger le centre de Montpellier.
Mieux, il s’agit aussi d’un véritable argument écologique puisque comme on aime le répéter, le train est moins polluant que le camion par exemple. Cette nouvelle ligne permet d’ailleurs de supprimer 3 000 poids-lourds par jour sur l’autoroute A9. Et quand on sait en plus que cette gare va aussi accueillir des voyageurs, elle a tout du bon plan. Non ?
Trêve de plaisanterie. Le constat est loin d’être aussi rose malheureusement. En 2014, la Cour des comptes publiait un rapport intitulé « La Grande Vitesse Ferroviaire : un modèle porté au-delà de sa pertinence ». Elle montre que « les bénéfices de la grande vitesse ferroviaire pour la collectivité sont moindres qu’escomptés, que la réalisation d’une ligne à grande vitesse est dépendante de paramètres subjectifs et politiques” , et que les ressources financières permettent tout juste la construction des lignes.
De même, l’Observatoire de la saturation ferroviaire délivrait un communiqué en mai 2016affirmant que les infrastructures déjà existantes suffisaient car « seul un quai sur six atteint un taux de 58%, quand le seuil critique est placé à 60%. Sur les cinq autres, le curseur se situe entre 20 et 37%« .
Au final, il a fallu débourser près de 143 millions d’euros pour cette ligne mixte, dont 32 millions de participation financière de la Région qui avait suspendu cette aide pour cette gare où, d’après la société Oc’Via chargée de la construire, la plupart des « trains qui passeront ne s’arrêteront pas. »
Pourquoi un tel projet ?
D’après FranceInfo, il n’y aurait que 4 TGV par jour qui s’arrêteraient, sachant qu’ils ne pourront pas non plus rouler à leur vitesse de croisière. Ils seraient au minimum « bridés » à 220 km/h. D’où les seules 15 minutes de gagnées sur les trajets des voyageurs.
L’argument écologique tombe aussi rapidement à l’eau, de l’aveu même d’Oc’Via. « Pour l’instant, le seul moyen de se rendre à la gare nouvelle est la voiture. En effet, la zone n’est pas encore desservie par les transports en commun. » Un bus et un tramway devraient néanmoins voir le jour pour cette gare très excentrée.
Alors, avec tous ces points négatifs, quel est l’intérêt de construire La Mogère ? Lorsqu’elle sera pleinement opérationnelle (si elle l’est un jour), elle permettra de créer un pôle d’activité tout autour. Mais encore faudra-t-il pouvoir attirer des entreprises loin de […]
Adrien Pittore – Décider & Entreprendre