Lettre à lire pour prendre connaissance de cette page noire de l’histoire algérienne que peu de gens connaissent, à savoir les camps de concentration du Sud – une zone irradiée depuis les essais atomiques français – dans lesquels des dizaines de milliers d’Algériens ont été parqués à ciel ouvert, puis sous des tentes, souvent pour rien et sans jugement !
À Monsieur le Médiateur de la République.
Monsieur le médiateur,
Mais jusqu’à quand imposera-t-on la force de l’injustice, de la discrimination et du silence, à la force de la vérité, de la justice et de l’histoire ? La violence du mépris face à l’interrogation était-elle suffisante ? Encourage-t-on l’indolence pour dissimuler le complexe de culpabilité, d’un pouvoir insurrectionnel établi en Janvier 1992, à l’aide de baïonnettes par un pronunciamiento militaire, composé d’une équipe de généraux déserteurs de l’armée française, devenus par la ruse, le mensonge et la déloyauté, des moudjahidines de la 25 heure, pouvoir né de l’armée des planqués, déserteurs de l’armée française dont la première mission fut, la culture de la fitna et la zizanie entre les fils d’une même nation, alors qu’en vérité, ils ne sont en réalité qu’un groupe d’officiers, félons, traitres, vicieux, ambitieux et fanatiques, qui nous rappellent le quarteron : Challe, Salan, Jouhaux, et Zeller de triste mémoire. Un quarteron sans honneur, encouragé et soutenu par une association haineuse, composée de nostalgiques de l’Algérie française, d’affairistes, et de parvenus érigés en sauveurs de la république qu’ils ont mis à genoux.
Le Comité de Défense des Internés des Camps du Sud, depuis sa création le 18 Mars 2009 et les victimes de la déportation de février 1992, n’ont pas cessé de revendiquer légalement et pacifiquement, une justice qui soit capable de faire droit aux cris des victimes de l’enfer des camps de la honte, de mettre fin à nos sentiments d’iniquité, de frustrations, et de nous restituer la dignité, pour laquelle se sont sacrifiés nos pères et nos frères.
Considérant que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, -Décret du 14 août 2005 et Ordonnance du 27 février 2006- est discriminatoire à l’égard des internés des camps du sud et leurs proches, et que ses articles 45 et 46 sont beaucoup plus un mélange de menace et de chantage, que toute autre chose, ils ont une forme dissimulée de dissuasion, qui nous relèguent à un rang non déclarés d’apatrides. intimidations qui ajoute leur poids à l’injustice que nous avions arbitrairement subi et aux dénis de droits non signifiés que nous subissons, du fait de l’inconsidération et de l’insensibilité réservées aux cobayes de la république que nous sommes, que le fugitif Khaled Nezzar et ses acolytes ont livré en pâture, à la radioactivité nucléaire, chimique et bactériologique, que recèle le triangle de la mort : Reggane, Oued-Namous et In-M’Guel.
Monsieur le Médiateur,
L’interdiction de discriminer est un principe central des normes internationales en matière de droits humains. Elle a été inscrite, sur la base de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, dans plusieurs traités de l’ONU :
Art 02 de la Déclaration universelle des droits de l’homme :
– §1: Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
– §2 : De plus, il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle, non autonome ou soumis à une limitation quelconque de souveraineté.
Article 7 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme :
Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination.
Article 7 : Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination.
Article 8 : Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi.
Article 9 : Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé.
Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques -PIRDCP-
Art. 2 : §2 : Les Etats parties au présent Pacte s’engagent à garantir que les droits qui y sont énoncés seront exercés sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique ou toute autre opinion, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
Pacte International Relatif aux Droits Sociaux, économiques et Culturels –PIRDSEC-
Art. 2: §1 : Les Etats parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
Art. 26: Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi. A cet égard, la loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et efficace contre toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique et de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
La Déclaration Islamique des Droits de l’Homme du 05 août 1990 :
Art. 20 – Nul ne peut arrêter un individu, restreindre sa liberté, l’exiler ou lui infliger une peine sans raison légale. Nul ne peut l’exposer à la torture physique ou morale ou à tout autre traitement humiliant, brutal ou contraire à la dignité humaine. Il n’est pas non plus permis de soumettre un individu à des expériences médicales ou scientifiques, sauf consentement de sa part et à la condition de ne pas mettre sa santé ou sa vie en danger. Il n’est pas permis de promulguer des lois exceptionnelles qui permettent aux autorités exécutives de recourir à de tels traitements.
Article 03 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples :
– §1. Toutes les personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi.
– §2. Toutes les personnes ont droit à une égale protection de la loi.
Article 06 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples :
– Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions préalablement déterminés par la loi; en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement.
Monsieur le Médiateur,
Notre internement dans des lieux connus et reconnus irradiés, est un crime collectif planifié que le droit international qualifie de génocide, ce qui explique la discrimination dont sont injustement victimes en général les internés des camps du sud, et en particulier, les veuves et les orphelins de nos co-déportés qu’un cancer a arraché à la vie et à leurs proches qui sont livrés à un état d’abandon, injuste sans précèdent. Rien n’explique, ni ne justifie cette discrimination au regard de notre arrestation sans mandat légal, de notre séquestration arbitraire dans des lieux irradiés, ou alors de notre remise en liberté sans inculpation et sans procès. Il faut bien admettre que si la volonté politique est l’édification d’un réel Etat de droit, ou la paix et le bien-être seront égalitaires et communautaires, reconnaitre que nous rendre justice, permettrait la reconstruction progressive de la confiance entre gouvernants et gouvernés.
Monsieur le Médiateur,
Il est de mon devoir, à titre de porte-parole du Comité de Défense des Internés des Camps du Sud, de souligner d’une part que les motifs évoqués pour nous interner sont de la pure mascarade, et indigne d’une justice qui se veut saine. Ces accusations fallacieuses qui en vérité furent des délits de faciès et des règlements de comptes ont servi le renforcement de l’injustice, voire la division du peuple. Les commanditaires de cette forfaiture à grande échelle devraient avoir honte aujourd’hui. Honte pour avoir livré des anciens moudjahidines, des fils de moudjahidines et de Chouhada à la radioactivité nucléaire, et d’autre part, de me questionner pour savoir si ce n’était pas par souci de la France « civilisatrice », de connaitre quels sont les effets de ses bombes sur les humains, trente années après leurs expérimentations ? Des hommes armés sont venus dans nos maisons comme des voleurs en pleine nuit, et ont sans mandat légal, procédé à des arrestations sous les regards de nos enfants, de nos épouses, de nos parents, ce que la loi apparente à des enlèvements. Honte au système qui a permis ces actes injustes, alors n’est-il pas temps que soit pris conscience des horreurs, des souffrances, des injustices dont nous fûmes, et nous sommes encore victimes. Il est vrai qu’il faut réellement être victime, pour comprendre la douleur et la détresse que provoque l’injustice.
Il y a des moments dans la vie où on ressent monter en nous une colère profonde, irrésistible. C’est ce qui m’arrive à l’heure où j’écris, car en plus de victime d’une grande injustice, notre Comité porte sur ses épaules le poids éreintant de la frustration de milliers d’anciens internés des camps du Sud et celui de leurs familles, laissés pour compte par ceux qui continuent à jubiler de leur égoïsme, de leur sadisme, de leur instinct de domination, cas pathologiques insensibles et discriminants, qui tentent de résister aux grands fleuves de l’évolution humaine.
Monsieur le Médiateur,
Qui oserait dire bien en face à nombreux d’entre les internés :
– « Moudjahidines vous fûtes des héros durant la révolution »,
Aux fils de ces derniers :
– « Vos pères ont libéré le pays, et par reconnaissance, vous avez été injustement déportés ».
Qui aurait le courage de dire aux enfants de chahid :
– « Vos pères se sont sacrifiés pour qu’aujourd’hui vous soyez atteints de cancer et considérés mauvais citoyens, simplement parce que des déserteurs de l’armée française, des traitres devenus des anciens (faux) combattants, ont décidé de terminer la sale besogne coloniale contre les fils de l’Algérie », en vous internant au Nom du peuple algérien, sans qu’ils ne fussent mandatés.
Monsieur le Médiateur, je tiens à m’arrêter ici, bien que je puisse écrire mille tomes d’un livre d’un million de pages chacun, pour vous relater la politique éradicatrice des ouled frança,. Je peux également passer des années à réciter, les exactions commises par nos adorables sauvegardistes, qui surpassent de très loin ce qui est reproché aux autres. Je peux peindre sur chacun des millions de murs de ma chère Patrie, et toujours manquer de place, pour y peindre les larmes qu’a fait couler et continue à faire couler, l’injustice et l’arbitraire, dont nous sommes victimes.
En attendant que vous accorderiez une audience à notre Comité.
Alger le 24 Février 2020