
Marisol Touraine a saisi mardi l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) concernant le Dépakine. Contacté par L’Express, Maître Charles Joseph-Oudin, l’avocat des familles, « se réjouit » de cette décision et pointe du doigt le fabricant de ce médicament controversé.
Vers un nouveau scandale sanitaire? Le Dépakine fait, depuis ce mardi, l’objet d’une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). C’est la ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui a annoncé cette décision. Cet anti-épileptique, pris par des femmes enceintes durant leurs grossesses, serait à l’origine d’au moins 370 malformations à la naissance en France. Plusieurs plaintes ont été déposées pour « non-signalement d’effets indésirables ». Joint par L’Express, Maître Charles Joseph-Oudin, l’avocat des familles réagit à cette décision. Pour lui, le laboratoire Sanofi, qui fabrique ce médicament, doit désormais faire des propositions concrètes pour la prise en charge des enfants malades.
Quel est votre sentiment à la suite de la décision de Marisol Touraine de saisir l’Igas?
Le 10 juin dernier, j’écrivais justement à la ministre de la Santé pour lui demander que l’Igas soit nommée dans cette affaire, alors, bien évidemment, je me réjouis qu’elle ait diligenté cette enquête. Nous sommes face à une situation très grave. Il y a eu des dysfonctionnements majeurs concernant les informations données aux consommatrices de Dépakine, et notamment aux patientes enceintes. L’Igas a déjà montré sa grande compétence et son efficacité dans le dossier du Mediator. Nous restons à sa disposition.
Cette procédure est-elle suffisante selon vous?
Parallèlement à la saisie de l’Igas, Marisol Touraine a sollicité la Caisse d’Assurance Maladie. L’objectif de cette seconde procédure est d’analyser les données de remboursement. A partir de là, il sera possible de mesurer le nombre précis d’enfants qui ont été exposés in utero à la Dépakine ainsi que ceux atteints de malformations. Outre ces deux enquêtes, l’important pour les familles est de comprendre comment on a pu en arriver là. Le laboratoire Sanofi est étrangement silencieux. Ce dernier doit prendre ses responsabilités et faire des propositions concrètes concernant la prise en charge des enfants malades.
Diriez-vous que les autorités ont trop attendu pour lancer une procédure?
Absolument. Depuis le milieu des années 1990, la littérature scientifique affirme la toxicité et la dangerosité du Dépakine pour les foetus exposés in utero. Les informations n’ont pas bougé depuis cette date. Rien ne justifie que les autorités aient attendu juillet 2015 pour agir. C’est ignorer que, tous les ans, un nombre indéterminé d’enfants naissent avec des malformations causées par ce médicament.
Comment ont réagi les familles concernées?
Elles sont très contentes, bien sûr. J’en ai eu quelques-unes au téléphone. Elles se réjouissent de voir qu’enfin les autorités prennent conscience de la gravité du problème.
En mai, vous indiquiez à l’Express traiter une vingtaine de dossiers liés au médicament Dépakine, ce chiffre est-il toujours d’actualité?
Ce chiffre a considérablement augmenté ces derniers mois. Je traite actuellement entre 150 et 200 dossiers. L’apesac [Association d’Aide aux Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anti-Convulsivant, NDLR] a également été contactée par plus de 500 familles. Il y a aujourd’hui énormément de personnes qui découvrent que les troubles de leur(s) enfant(s) pourraient être dus au Dépakine.
Hermance Murque