La situation de la liberté d’expression et du travail de la presse est catastrophique en Algérie depuis l’arrivée de A. Tebboune au pouvoir ; l’arrestation du célèbre journaliste Ihsane El Kadi le 24 décembre dernier le démontre. Des centaines d’autres citoyens ont également été incarcérés pour de simples tweets ou likes sur le Net ! Pourtant, pas un mot dans les médias parisiens si ce n’est ce communiqué de RSF ainsi qu’un très léger article du Monde et de La Croix. Le pouvoir autoritaire corrompu l’accuse notamment d’avoir reçu de l’argent de l’étranger, argument d’une rare stupidité qui ne tient pas la route une seule seconde.
La réaction de la caste journalistique parisienne, sans oublier les membres du gouvernement actuel, est extrêmement timide, voire timorée : aucun débat télévisé, aucun plateau télé pour dénoncer cette incarcération. On vous laisse imaginer une fraction de seconde ce qu’il se serait produit s’il s’était agi d’un journaliste iranien ; le tollé qu’aurait fait cette arrestation avec une multiplication sans fin des passages télévisés de BHL pour dénoncer la méchante république islamique (sans oublier la Russie bien entendu) ! Comme cela se passe en Algérie et que les relations franco-algériennes sont bonnes actuellement, le silence complice de la junte parisienne est de mise. Les membres du gouvernement de macron pourront continuer leurs allées et venues entre Paris et Alger sans jamais condamner ces dérives totalitaires inacceptables ! Ce qui ne les empêchera pas de donner des leçons de droits de l’homme, de liberté d’expression à la planète entière et à Poutine en particulier.
Nous pouvons constater les mêmes réactions dans le camp des faux démocrates algériens dont le silence assourdissant est extrêmement gênant comme c’est le cas, par exemple, de Said Sadi dont tout le monde peut constater qu’à ce jour 5 janvier 2023, soit 12 jours après l’incarcération d’El Kadi Ihsane, la page Facebook ne traite pas de cette dérive ! Tout n’est question que d’opportunités, de calculs politiques étroits, d’intérêts immédiats…
Par courrier daté du mardi 3 janvier 2022, RSF a saisi en urgence la rapporteuse spéciale de l’ONU sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression – Irene Khan – de la détention d’Ihsane El Kadi.
Dans cette communication officielle, l’organisation souligne que l’arrestation du journaliste, le 24 décembre, est intervenue quelques jours seulement après la publication d’articles critiques envers les autorités. Cette chronologie accrédite une motivation politique derrière son arrestation et une volonté claire de museler les médias indépendants offrant une tribune aux défenseurs de la liberté d’expression.
« Nous demandons à la Rapporteuse spéciale des Nations unies d’appeler d’urgence les autorités au respect de leurs obligations internationales et constitutionnelles. Les Nations unies doivent exiger la libération immédiate d’Ihsane El Kadi et l’abandon pur et simple de poursuites fallacieuses qui ne visent qu’à le réduire au silence.»
Antoine BernardDirecteur du plaidoyer et de l’assistance de RSFDébut décembre 2022, RSF appelait déjà les autorités algériennes à mettre un terme au harcèlement judiciaire visant le journaliste. Condamnation à 6 mois de prison en juin 2022, multiple reports de son procès en appel ou encore convocations répétées au mois de novembre… Avec son arrestation, c’est une nouvelle intensification des intimidations dont fait l’objet le journaliste, en violation de la Constitution algérienne qui consacre pourtant la liberté d’opinion.
Due à une constante augmentation des menaces, des intimidations et du harcèlement judiciaire des journalistes, l’Algérie se classe à la 134e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2022.
Photo d’illustration : La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, Irene Khan, à Genève en 2021 / FABRICE COFFRINI / AFP
RSF [Reporters sans frontières]
4 janvier 2023