Cela fait plus de 20 ans que les écrans ont été désignés comme nocifs pour l’apprentissage des enfants, par des milliers d’études scientifiques validées dans toutes les universités du monde. Le chercheur Michel Desmurget l’a démontré dans son magistral ouvrage TV lobotomie, la vérité scientifique sur les effets de la télévision. Nous en avions parlé à l’époque de la sortie du livre. Nous l’avions invité à donner une conférence à Marseille, tout le monde est au courant de la dangerosité des écrans. Pourtant, ce n’est que maintenant que la Suède juge que ces mêmes écrans font baisser le niveau scolaire ! Comment est-il possible d’avoir 20 ans de retard sur une science publiée et validée ? Pire encore, nos dirigeants politiques vont continuer sur cette voie destructrice des tablettes et autres écrans informatiques dans les écoles en faisant croire que c’est une avancée, un grand progrès !
Est-on allé trop vite, trop loin, trop tôt ?
Depuis quelques mois, cette petite musique monte en Suède. Elle questionne la place des écrans et du numérique dans les établissements scolaires du royaume, remise en cause par les professionnels de la santé.
Le 15 mai, la ministre des écoles, Lotta Edholm, a réagi en enterrant la stratégie de l’agence nationale de l’enseignement scolaire (Skolverket), en faveur de la poursuite du numérique, présentée en décembre 2022.
À l’époque, déjà, la ministre avait exprimé ses doutes, dans une tribune publiée dans le journal Expressen, le 21 décembre. Elle y qualifiait l’usage du numérique dans les écoles suédoises d’« expérimentation » et s’agaçait de « l’attitude dépourvue d’esprit critique qui considérait, avec désinvolture, la numérisation comme bonne, quel que soit son contenu », conduisant à « la mise à l’écart » du manuel scolaire, dont elle rappelait qu’il a « des avantages qu’aucune tablette ne peut remplacer ».
Pour y remédier, le gouvernement de centre-droit a annoncé qu’il allait débloquer 685 millions de couronnes (60 millions d’euros) cette année et 500 millions (44 millions d’euros) par an en 2024 et en 2025, pour accélérer le retour des manuels dans les établissements scolaires. « Cela fait partie du retour de la lecture à l’école, au détriment du temps d’écran », expliquait la ministre. Objectif : garantir un livre par élève et par matière.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Depuis une quinzaine d’années, les écrans ont progressivement remplacé les manuels. A partir du collège, surtout, les élèves passent de plus en plus de temps devant les ordinateurs, en général fournis par l’établissement : peu importent les matières, ils doivent se connecter à Internet, pour chercher des informations en ligne, rédiger un devoir ou faire leurs révisions.
« Démocratie et égalité »
Photo d’illustration : Des élèves de maternelle travaillent avec des tablettes, dans une école de Stockholm, le 3 mars 2014.
21 mai 2023