La gangrène touche absolument tout le monde, tous les partis politiques de tous bords. Même le parti communiste français qui est censé être celui qui représente les classes populaires les plus défavorisées, les travailleurs et ouvriers les plus modestes, semble gérer le budget du parti comme le PS ou l’UMP. Faire facturer par les collectivités des formations qui n’ont jamais existé, cela ressemble curieusement aux prestations fantômes de l’affaire Bygmalion (dont on n’entend plus parler, curieusement…) ! C’est une honte d’autant que dans les faits, le PCF ne représente plus rien !
Ce nouveau scandale de la vie politique particratique française ne fait que donner encore 1000 fois raison à la géniale Simone Weil, auteure de la Note sur la suppression générale des partis politiques. Les partis politiques sont des parasites de la vie publique et doivent être supprimés.
Le 24 avril publiée par Mathieu Périsse sur le site de Mediapart une importante enquête sur ce qu’elle appelle « Les très coûteuses formations des élus communistes » levait un coin de voile sur les pratiques dont le PCF continue de polluer la vie municipale en dépit de son déclin électoral.
Alors que la justice enquête sur un financement présumé illicite du Parti communiste via un organisme de formation destiné aux élus, Mediacités publie le témoignage d’un conseiller municipal de Givors qui affirme ne pas avoir assisté à des formations facturées à sa commune. Révélations sur un système.
« Je suis une personne intègre, je ne veux pas tremper dans des magouilles…». Le ton est déterminé. À 57 ans, Mohsen Allali le répète, il n’a « rien à cacher ». Parmi les élus communistes et apparentés des dernières « banlieues rouges » de Lyon, il est l’un des rares à parler ouvertement. Conseiller municipal de Givors depuis 2014, cet employé chez un bailleur social local a quitté la majorité après les déboires judiciaires de Martial Passi, l’ancien maire (PCF) de la ville, condamné en première instance en juillet dernier à six mois de prison avec sursis et trois ans d’inéligibilité pour « prise illégale d’intérêt ». Après, surtout, la publication d’un rapport incendiaire de la Chambre régionale des comptes (CRC), qui s’est penchée sur la gestion de la ville entre 2009 et 2015.Au détour de ses 70 pages, le rapport s’attardait sur la gestion de la formation des élus dans la commune. Depuis 2009, la ville de 20 000 habitants a consacré entre 3 654 euros et 8 778 euros par an à ces formations pour l’ensemble du conseil municipal. Une somme relativement modeste, mais qui a intrigué les magistrats de la CRC et placé dans leur radar le Centre d’information, de documentation, d’étude et de formation des élus (Cidefe). Cette boîte noire, organisme de formation proche du Parti communiste et installé depuis sa création à Montreuil, en banlieue parisienne, est aujourd’hui dans l’œil de la justice. Le Parquet national financier la soupçonne d’être un outil de financement illégal du PCF. Le témoignage recueilli par Mediacités de Mohsen Allali, ainsi que celui d’un formateur (lire plus bas), viennent documenter le fonctionnement pour le moins troublant du Cidefe.
Mais revenons au rapport de la CRC.
Premier constat dressé par les magistrats, la quasi-totalité des formations payées par la commune de Givors ont été assurées par le Cidefe, dont une antenne a été créée dans l’agglomération lyonnaise en 1996. Surtout, la CRC remarque que les formations sont effectuées « sur la base d’une convention signée par le maire », qui engage « une quinzaine d’élus environ ». Et les magistrats de conclure : « En signant ces conventions, le maire se substitue aux élus et engage financièrement la commune sur un montant forfaitaire de prestations, acquitté au cours du premier trimestre de l’année, avant qu’elles aient été réalisées.» Autrement dit : la commune de Givors achète au Cidefe une sorte « d’abonnement » de formation pour ses élus, qui sont ensuite libres de participer ou non aux ateliers proposés. En théorie, « l’article 6 des conventions stipule qu’elles [les conventions] peuvent être modifiées par avenant pour tenir compte du nombre réel de participants », précise la CRC.
Et la CRC de conclure que le dispositif mis en place à Givors « met quelque peu à mal le principe de libre choix par les élus des organismes de formation agréés et méconnaît les principes de la commande publique ». Si les conseillers municipaux souhaitaient exercer leur droit à la formation de manière collective, le Cidefe aurait dû être sélectionné via la passation d’un marché public, ce qui n’a pas été le cas. Une lecture contestée par Martial Passi dans sa réponse aux magistrats. « La commune ne priorise pas le Cidefe », estime l’ancien maire.
Pour y voir plus clair, Mediacités s’est penché sur les formations financées par la ville de Givors ces dernières années. Légalement, les communes sont tenues de publier un tableau récapitulatif annexé au compte administratif. En les épluchant, force est de constater que les formations payées par la ville n’attirent pas les foules. Ainsi en 2014, seules une quinzaine de journées de formations ont été suivies par les élus de la commune. Sur les 33 membres du conseil municipal, le nombre d’élus bénéficiant de ces formations ne dépasse pas la dizaine.
Pour facturer ses formations, le Cidefe applique une pondération en fonction de la strate de population des collectivités « clientes ». Selon ses tarifs 2018, une journée coûte seulement 84 euros par élu pour les plus petites communes (moins de 1 000 habitants) mais jusqu’à 856 euros pour les plus grandes villes (plus de 200 000 habitants). Suivant la même logique, une convention annuelle coûtera de 252 euros à 2 567 euros. Le choix d’une convention annuelle devient donc intéressant pour la commune à condition que chaque élu se rende au moins trois fois dans l’année à une formation. À Givors, l’utilisation de ces « forfaits » s’avère peu judicieuse, beaucoup d’élus assistant seulement à une, au maximum deux formations par an.
Mais pour Mohsen Allali, la lecture de ces listes a été plus surprenante encore. Dans le compte administratif de la commune, l’élu est mentionné à trois reprises comme ayant participé à des formations. Un atelier dédié à la communication appelé « À l’oral tout parle » organisé en 2014, un autre sur le changement climatique en 2015, et les « Rencontres nationales de Saint-Étienne – 2e journée » en 2016. Pourtant, Mohsen Allali est formel : « Je n’ai fait aucune de ces formations. Je n’ai jamais mis les pieds dans aucun de ces ateliers. »
Institut d’Histoire sociale
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