Un gréviste pose devant la raffinerie Total de Feyzin (Rhône), le 25 mai 2016. (JEFF PACHOUD / AFP)
Un lexique effrayant a vu le jour ces derniers temps et s’est invité dans le débat sur la loi Travail. On comprend mieux maintenant à quoi sert tout ce cirque terroriste dont les auteurs sont des délinquants paumés qui n’ont rien à voir avec l’islam, trop souvent manipulés par des services occultes à l’agenda connu des initiés…
Le champ lexical du terrorisme s’est incrusté dans le débat, pour attaquer les actions des syndicats qui maintiennent la pression sur le gouvernement.
C’est un classique. Dans toutes les récentes vagues de grèves en France, il s’est toujours trouvé quelqu’un, un responsable politique par exemple, pour dénoncer la “prise en otage” des usagers, des Français, des automobilistes… Mais face au mouvement d’opposition à la loi El Khomri, qui dure depuis deux mois, le vocabulaire s’est élargi et durci, au point de rejoindre clairement le champ lexical du terrorisme. Dernier exemple en date : le patron du Medef qui a comparé les militants CGT à des “terroristes”, lundi 30 mai, avant de revenir, deux jours plus tard, sur ses propos.
Francetv info revient sur ces mots inadaptés qui servent aujourd’hui, à tort, à désigner les grévistes.
“Des minorités qui se comportent comme des terroristes”
Qui l’a dit ? Le Figaro, qui attaque, dans un édito du 23 mai, le “terrorisme social” de la CGT. Et dans la foulée, Pierre Gattaz, président du Medef. Dans un entretien au Monde, lundi, il déclare que “faire respecter l’Etat de droit, c’est faire en sorte que les minorités qui se comportent un peu comme des voyous, comme des terroristes, ne bloquent pas tout le pays”.
Pourquoi c’est déplacé ? Quelques mois après les attentats de novembre qui ont fait 130 morts à Paris, il est déplacé de comparer les grèves et les blocages de raffineries à des actions terroristes, ce qu’a fait remarquer, entre autres, le député de Paris Pascal Cherki (PS).
“Ce mot a été mal compris et peut choquer, notamment les personnes qui ont été touchées par les événements récents qui ont endeuillé notre pays”, a d’ailleurs reconnu Pierre Gattaz mercredi.“La France est soumise à (…) Daech et à la CGT”
Qui l’a dit ? L’éditorialiste Franz-Olivier Giesbert, dans Le Point, mercredi 1er juin. “Même si la comparaison peut paraître scabreuse, est-il si illégitime d’oser la formuler ? La France est soumise aujourd’hui à deux menaces qui, pour être différentes, n’en mettent pas moins en péril son intégrité : Daech et la CGT”, écrit-il. Quelques semaines plus tôt, le même FOG comparait la CGT au Front national, “un boulet national” et une “exception française”.
Pourquoi c’est vraiment inapproprié ? Faut-il vraiment l’expliquer ? Daech (l’acronyme arabe de l’organisation État islamique) est notamment connue pour la guerre qu’elle mène en Irak et en Syrie, pour ses multiples attentats et pour la mise en scène macabre de décapitation de ses otages…
Camille Caldini