Extraordinaire humiliation que celle du refus de se débarrasser de Damien Abad, de l’incapacité d’Élisabeth Borne, en tant que femme, de lâcher ce boulet extrêmement gênant appartenant à son gouvernement. C’est la parfaite démonstration qu’elle ne contrôle absolument rien, qu’elle a été mise à ce poste juste parce que c’est une femme afin de jouer la carte de la modernité et que c’est un homme qui lui dicte ce qu’elle doit faire au quotidien. Quelle merveilleuse avancée de la cause féminine… Alexis Kohler a infiniment plus de pouvoir qu’elle, ce qui est une anomalie démocratique.
Sa nomination, au bout de vingt-deux jours, s’est jouée à un fil. Un mois plus tard, son sort est déjà incertain.
L’austère Élisabeth Borne, si elle sauve sa tête à Matignon, va devoir replâtrer son gouvernement… et faire preuve d’autorité. Découvrez un extrait en libre accès de notre enquête sur la Première ministre.
(…) La Première ministre n’est pas franchement le chef incontesté de la majorité. Quand Matignon a proposé, sur une boucle WhatsApp des 577 candidats de la majorité présidentielle, des photos d’Élisabeth Borne pour des affiches de campagne… aucun candidat ne s’est manifesté. « Édouard Philippe, en 2017, avait mené la bataille des législatives, se souvient un Marcheur. Mais là, absolument tout s’est décidé sans elle. » Comment, dans ces conditions, pourra-t-elle faire preuve d’autorité à l’Assemblée ?Même les premiers coups de chaud d’actualité ont montré son effacement. Premier accroc, l’affaire Abad, le vendredi 20 mai, au lendemain de la désignation de son gouvernement. Selon plusieurs sources, durant le week-end, Élisabeth Borne plaide pour sa mise en retrait immédiate. Elle devra avaler son chapeau, Emmanuel Macron décidant de le garder. Deuxième secousse, le fiasco du Stade de France. La Première ministre, alors que son ministre de l’Intérieur s’enferre dans un discours martial, est aux abonnés absents pendant plusieurs jours.
Macron-Kohler, le vrai duo au sommet de l’État
« Tout se discute exclusivement à l’Élysée, d’ailleurs la plupart des ministres, Gérald Darmanin en tête, échangent en direct avec le président » reconnaît un poids lourd de la majorité, constatant que « jamais, sous la Ve République, un Premier ministre n’avait été autant en situation de retrait ». « Borne n’est plus que super-porte-parole du gouvernement, tous les arbitrages ayant lieu dans le bureau du “PR” » constate un proche du chef de l’État…
Laurent Valdiguié
17 juin 2022