Toujours la même triste histoire, on nous explique que les caisses sont vides mais il y a toujours quelques milliards pour le cirque ; curieusement ces milliards disparaissent de plus en plus quand il s’agit de pain. On sait tous qu’au bas mot, le budget finira par être doublé comme l’ont montré les précédentes organisations des JO que ce soit à Londres ou à Pékin… et que les retombées économiques seront absentes comme toujours.
Ce sera une occasion supplémentaire offerte aux drogués et aux tricheurs pour faire les pitres sur les terrains et autres pistes d’athlétisme pendant que la crise et le chômage s’accentuent et s’installent durablement.
Paris va bientôt savoir si elle organisera les jeux Olympiques 2024 ou 2028. L’économiste Alexandre Delaigue met en garde contre une éventuelle gabegie.
C’est fait ! Los Angeles a annoncé dans la nuit de lundi à mardi 1er août un accord avec le CIO qui lui permet d’accueillir les Jeux Olympiques de 2028, offrant ainsi quasi définitivement la victoire pour 2024 à Paris et évitant au comité Olympique un choix cornélien.L’heure est donc aux grands calculs. Pour Alexandre Delaigue, professeur d’économie à l’université Lille-I, « les expériences passées nous prouvent bien que le budget alloué à un tel événement dépasse systématiquement ses objectifs ». Selon lui, les retombées économiques sont illusoires et les coûts toujours minimisés. Interview.
La réponse est simple : non. C’est toujours un gouffre financier. Les JO de 1976 à Montréal en sont l’exemple criant. Les contribuables ont mis près de trente ans à rembourser la dette. Le budget initialement prévu pour organiser des JO est toujours multiplié par 2,5 !
Il y a donc un écart énorme entre l’anticipé et la réalité. Cette règle s’applique pour tous les projets d’une telle ampleur. Ils sont à coup sûr exposés à ce dépassement budgétaire. On peut aussi penser à la construction du tunnel sous la Manche qui a coûté beaucoup plus que prévu.
Pensez-vous que Paris respectera son enveloppe budgétaire de 6 milliards de dollars ?
C’est impossible. Ce n’est pas une question de mauvaise foi. Le gouvernement et la Ville de Paris sont persuadés qu’ils peuvent y parvenir. Mais les expériences passées nous prouvent bien que le budget alloué à un tel événement dépasse systématiquement ses objectifs. L’organisation des derniers JO, à Tokyo en est l’illustration parfaite. Les coûts devaient s’élever à 7 milliards, ils ont atteint les 12 milliards…
La première raison de ce dépassement est simple : elle tient à la relation entre l’organisateur et les fournisseurs de services. Imaginez bien, s’il y a un impondérable, l’organisateur se doit d’effectuer une dépense supplémentaire pour y répondre. Avec un projet de la sorte, il ne peut pas y avoir de bonne surprise.
Le paramètre du temps est également à prendre en compte : tout doit être prêt le jour J. Souvent, les surcoûts arrivent dans les six derniers mois avant le lancement du projet. C’était le cas pour le Brésil et la Grèce.
Le gouvernement affirme pouvoir économiser 5 milliards grâce à des coupes budgétaires. N’est-ce pas suffisant pour investir dans une source de dynamisme économique telle que les JO ?
Ces économies doivent être réalisées pour combler le déficit. Si elles le sont en vertu de l’organisation des JO, c’est très problématique. Comprenez, c’est un peu comme la personne qui vous dit qu’elle n’arrive pas à joindre les deux bouts, mais que vous croisez dans un bar à siroter des cocktails. Les pouvoirs publics se trouvent dans cette même contradiction. D’un côté, l’Etat nous dit qu’il faut se serrer la ceinture, mais il se lance en même temps dans un projet aux dépenses colossales et incertaines.
L’argument encore plus désinvolte : utiliser le prétexte des JO pour créer des infrastructures utiles aux Parisiens. C’est faire passer les intérêts des habitants de Paris au second plan et se moquer d’eux. Si besoin est, pourquoi attendre les Jeux pour y répondre ?
D’autant plus que l’argent ne pousse pas des arbres… Et puisque cette organisation repose sur le budget de l’Etat et de la Ville de Paris, ce sont les contribuables qui paieront les frais de ces dépenses exagérées.
Les Jeux ont été créés pour « promouvoir l’amitié et la paix entre les peuples », Emmanuel Macron parle même « d’esprit universel ». N’est-il pas un peu dommage de vouloir renoncer à cet événement vecteur de valeurs et de prestige ?
Je suis tout à fait favorable aux JO, je les regarde avec plaisir ! Mais je préfère quand ils sont organisés ailleurs… Il faudrait que les pouvoirs publics et le CIO réfléchissent enfin à un système évitant les dépenses outrancières. Par rapport à cette notion de « prestige », si je vous dis Sydney, quelle est l’image qui vous vient directement à l’esprit ? Vous pensez à l’Opéra. Si je vous dis Paris ? Vous pensez à la tour Eiffel. Oui, ces bâtiments résultent de dépenses de prestiges, mais ils le sont dans le temps. Les […]
Propos recueillis par Camille Gillet – L’Obs