« Le refus de réintégrer les soignants non-vaccinés trahit une conception scientiste et puritaine de notre droit », par M. Nicolas Leblond

Expertise d'un maître de conférences de droit privé dénonçant la dérive totalitaire actuelle

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Voilà qui est dit. Cet article de Monsieur Nicolas Leblond, maître de conférences en droit privé à l’université polytechnique Hauts-de-France, revient sur la dérive totalitaire gravissime  du gouvernement au sujet de la suspension du personnel soignant non-injecté. Il revient, bien entendu, sur l’échec de ces injections concernant la transmission du virus qui rend toute obligation totalement obsolète et déraisonnable. C’est d’autant plus fou que le personnel injecté mais positif au Covid-19 et asymptomatique peut continuer à travailler ! Il avait déjà publié le 23 décembre 2021 un article dans le Figaro où il demandait un retour à une vie normale car il n’est pas concevable, selon lui, de vivre ad vitam aeternam dans un monde de restrictions et de peur.

Cela dit, il y a un enjeu beaucoup plus important pour tous et pas seulement les injectés contre les non-injectés. En réalité nous assistons aujourd’hui à une dérive grave de l’État de droit qui a transformé la loi en morale. Ce n’est donc plus une question de santé publique mais une question de projets politiques avec l’imposition d’une nouvelle morale qui n’a rien à voir avec la science et encore moins avec un quelconque intérêt de santé publique. D’ailleurs, il est demandé au personnel soignant non injecté de “croire” en la “science infaillible” ! C’est donc véritablement d’une croyance que l’on parle. On peut ainsi voir naître la nouvelle religion du futur, une religion extrêmement violente qui va exclure et excommunier toutes les personnes qui contrediront le dogme.

D’autant que l’argument qui consiste à faire croire qu’un soignant non-injecté est irresponsable car il pourrait contaminer un malade, que ça fait de lui un incroyant en la « science infaillible » ne tient pas la route une seconde. Pourquoi ? Parce qu’il faudrait dans ce cas, interdire à tous les cancérologues fumeurs d’exercer puisqu’en continuant à fumer, ils ne croient pas en la science, et s’exposent ainsi à des risques importants d’avoir un cancer ! On peut de cette façon multiplier les exemples…

Ainsi, les gens doivent comprendre d’urgence que si, aujourd’hui, la nouvelle religion naissante du scientisme s’attaque au non-injectés du Covid-19, demain elle s’attaquera à d’autres personnes, ce n’est qu’une question de temps. Un nouveau combat attend le peuple français, celui d’imposer une laïcité qui exclura et séparera le « scientisme » de l’Etat.



Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a réaffirmé l’exclusion des personnels de santé non-vaccinés, alors que l’Italie y a mis fin le 1er novembre.

Nicolas Leblond, maître de conférences de droit privé à l’université polytechnique Hauts-de-France, y voit l’instrumentalisation du droit dans un projet politique et une morale scientiste.

Alors que l’Italie a mis fin le 1er novembre à l’exclusion des personnels de santé non-vaccinés et que la France est l’un des derniers pays d’Europe à maintenir et à l’appliquer strictement, Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a répété qu’il ne veut pas entendre parler de leur réintégration. « Ça ne changerait rien au schmilblick », dit-il et symboliquement, cela n’apporterait rien car « les soignants [non suspendus] ne sont pas férus de l’idée ». On laissera à d’autres le soin de commenter la portée politique de ces propos et juger de ce qu’ils disent de la considération apportée à des personnes qui ont pourtant été sur le pont lors des premières vagues et qui sont, depuis leur suspension, privées de revenus. On ne veut ici s’attacher qu’au droit. Or contrairement à ce que semble dire le ministre, en droit, tout a charge de symbole. Pour le comprendre, plusieurs observations et rappels sont d’abord nécessaires.

Ce que dit le droit 

Au titre des observations, il est désormais avéré que le fait d’être vacciné, s’il réduit le risque de formes graves de la maladie, n’empêche ni d’être contaminé, ni d’être contaminant. De ces observations, il est alors possible de considérer que d’un point de vue de santé publique, les personnels non-vaccinés ne font principalement courir de risque qu’à eux-mêmes et fort peu à la collectivité. À celle-ci, ils en font courir d’autant moins qu’ils sont fort peu nombreux, comme le ministre de la Santé, François Braun, aime à le rappeler.

Au titre des rappels, il convient de se remémorer les objectifs assignés à la loi. On rappelle toujours ce célèbre passage du Discours préliminaire au Code civil de Portalis : « L’office de la loi est de fixer par de grandes vues les maximes générales du droit ». On oublie cependant que l’illustre codificateur a souligné que les lois sont aussi et surtout « des commandements », « des actes de souveraineté » et même, « des volontés ». Plus loin, il développe ce rôle politique de la loi, pointant que « les lois sont souvent l’unique morale du peuple ». Des juristes modernes ont depuis largement insisté sur le rôle politique de la loi.

Ce refus : une volonté, voire un projet

Ces observations et ces rappels faits, que dit alors le refus persistant de réintégrer les personnels non-vaccinés de notre conception contemporaine du droit ? Ce refus traduit à n’en pas douter une volonté, voire un projet. Celui-ci ne peut plus être, pour les raisons précédemment exposées, que la loi serve la santé publique. Ce n’est pas davantage une application du principe de précaution. L’invocation de ce principe ne serait justifiée que s’il existait un risque particulier pour la collectivité à ce que ces personnels ne soient pas vaccinés.

Or, il n’en est rien puisque vaccinés, ils pourraient pareillement être contaminés et contagieux. À cet égard en outre, l’invocation de ce principe apparaît artificiel dès lors que des personnels vaccinés mais contaminés peuvent continuer d’exercer et font pareillement courir un risque d’exposition au virus à leurs patients.

En conséquence, l’objectif du maintien de leur suspension ne peut être que l’expression d’une volonté politique. Il faut à cet égard écouter l’Académie de Médecine qui considère que, « le refus de se faire vacciner est incompatible avec le métier de soignant », mais surtout que « réintégrer les soignants non-vaccinés serait une faute » et « compromettrait le climat de confiance et la cohésion qui doivent exister entre (les membres de l’équipe soignante) et avec les malades » (avis du 19 juillet 2022). Pour les opposants à la réintégration des personnels non-vaccinés, on ne pourrait laisser des personnes soigner alors qu’elles ne croient pas en la science, mettant en doute l’efficacité des vaccins ou encore, parce qu’il serait normal d’exiger de ceux qui prennent soin des autres qu’ils prennent soin d’eux-mêmes. Certains vont jusqu’à dire qu’en refusant de se faire vacciner, ces personnels auraient démontré qu’ils n’adhéraient pas aux valeurs du soin.

La loi sert une volonté et devient l’instrument d’une morale

Ce sont ainsi des arguments principalement moraux qui sont avancés. Ils sont intéressants car ils traduisent une certaine conception de la santé et de la science. La santé, ce serait avant tout des valeurs du soin – on retrouve en filigrane la théorie du care – et non plus des compétences de soin. Quant à la science, elle serait une croyance. On ne fait plus de la science par l’expérience, quitte à remiser ses convictions d’hier face aux constats d’aujourd’hui, on doit désormais croire en elle. Plus grave, la science ne serait plus le fruit de la connaissance, mais l’adhésion à un dogme. Le scientisme, qui est en réalité une morale (A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie : PUF, 2010), est poussé à son maximum : la science dit vrai puisque c’est la science. Il apparaît alors qu’en refusant encore aux personnels non-vaccinés le droit d’exercer, la loi sert une volonté et devient l’instrument d’une morale dont le non-respect doit déboucher sur l’exclusion : les purs ont le droit pour eux et les impurs doivent être exclus…


Photo d’illustration : « Depuis Savonarole au moins, on sait pourtant que morale et liberté font rarement bon ménage.» © Hans Lucas via AFP

Nicolas Leblond

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18 novembre 2022
Source: Marianne

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