On ne peut faire mieux pour entretenir la confusion et discréditer l’équipe gouvernementale. Alors que Valls persiste à dire que “d’une manière ou d’une autre, le tueur est sans doute lié à l’islam radical”, Caseneuve fait preuve de prudence et d’expectative, à l’image du procureur Molins qui attend à juste titre les résultats d’une enquête qui ne fait, du reste, que commencer. C’est dire que le Premier ministre est animé de préjugés qui déforment la vision réelle des événements et faussent leur perception, concourant ainsi à forger et enraciner au sein de la population une opinion factice et dangereuse. Ce qui est à la fois décevant et affligeant dans la gestion de ces affaires, c’est la répétition des bourdes et des impairs, comme si les leçons précédentes n’avaient pas été retenues.
Sur TF1, le ministre de l’Intérieur a refusé d’accréditer ce vendredi soir la thèse développée quelques minutes plus tôt par son supérieur hiérarchique, qui a expliqué sur France 2 que le terroriste de Nice était “sans doute lié à l’islam radical”. Pour Bernard Cazeneuve, il est trop tôt pour le dire.
C’est une belle boulette de communication gouvernementale. Ce vendredi soir, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve, l’un Premier ministre, l’autre ministre de l’Intérieur, ont donné des informations contradictoires sur les motivations probables du terroriste Mohamed Lahouaiej Bouhlel qui a tué 84 personnes jeudi soir, à Nice.
Des avis divergents
Manuel Valls est le premier a être interrogé sur France 2. Le chef du gouvernement répond à Laurent Delahousse qui l’interroge sur les motivations du terroriste. Face caméra, il se montre alors assez affirmatif: oui, le chauffeur du camion qui a tué 84 personnes doit être considéré comme “un terroriste”. Il va ensuite plus loin et explique que c’est un terroriste “sans doute lié à l’islam radical, d’une manière ou d’une autre […] Le procureur de la République s’est exprimé très clairement. Nous verrons quelles sont les complicités et les liens avec les organisations terroristes”. Voilà qui est clair.
Sauf que. Quelques minutes plus tard, interrogé sur TF1, le ministre de l’Intérieur donne une version légèrement différente. Questionné sur les liens potentiels entre le terroriste et l’islam radical, Bernard Cazeneuve fait preuve d’une grande prudence et refuse d’accréditer cette hypothèse. “Pas en l’état des informations”, explique-t-il. “Nous avons un individu qui n’était pas du tout connu des services de renseignement pour des activités liées à l’islamisme radical, ajoute-t-il. Il n’est pas fiché S, il n’est pas au FSPRT, qui est le fichier qui rassemble tous ceux que nous suivons, il ne s’est pas fait connaître pour des activités liées à l’islam radical”.
En l’espace de quelques minutes, Manuel Valls s’est donc fait contredire en direct à la télé par son ministre de l’Intérieur.
Geoffrey Bonnefoy