C’est le sujet d’un propos, comme le livre en renferme, et est une réponse définitive à une question de légitimité que nos générations de la France qui s’efface ont posée. Il est bon d’affirmer et de vouloir conclure, chose rare en notre temps où rien ne se décide, car l’on est plus vite d’accord avec ce que l’on va dire, qu’avec sa propre conscience, laquelle trie entre ce qui vaut la peine d’être examiné ou rejeté comme oiseux. À cet égard, toutes les questions, sauf la seule peu claire, mais qui est un redressement du jugement du public, portant sur la judéophilie nietzschéenne, trouvent le sol où elles se déposent, rendues ainsi inertes en ayant longtemps flotté dans leur chute, coupées de l’arbre de la vie.
Je ne les développerai point toutes, mais dirai ma plus grande satisfaction avant de donner mon opinion sur d’autres. Le style le plus agréable sur un sujet qui fut débattu longtemps dans mon enfance, et dont l’illustre Giono a parlé en homme du pays, sera goûté de tous les lecteurs bienveillants, à savoir la culpabilité du vieux Dominici, le patriarche, comme on le nommait, dont les épaules auraient porté un crime commis par d’autres et que les débats embrouillèrent. A-t-il été sacrifié à une raison d’État, comme quand il obéissait aux consignes du Parti communiste, et les Dummond britanniques massacrés ou liquidés, sans pitié pour leur fille de 10 ans, auraient-ils été exécutés par un service spécialisé, à leur retour d’Indochine, comme il a été dit ? La question ne se referme pas, mais s’ouvre. Attendons l’après guerre pour le savoir. « Quand nos aînés n’y seront plus », selon le chant belliqueux et sauvage de ceux que l’Europe nommait « les nouveaux Français » !
Les questions sont celles d’un garçon de nos anciennes générations, que l’on se posait sur la fausse bataille de Valmy, la chiasse prussienne etc. et ce manifeste de Brunswick que l’on crut longtemps soudoyés par nos révolutionnaires et, le confondant avec un homonyme, comme le dit avec justesse le cardinal Pacca dans ses Mémoires, n’avait rien d’un illuminé ou sectaire.
…chaque peuple a le maître qu’il mérite !
Les faux mots historiques attribués à nos rois réels ou imaginaires y figurent. Et à ce sujet vaut la réflexion de Gobineau par ailleurs excellemment cité dans une de ses pièces délicieuses sur la Renaissance et auteur que les générations s’extasiant sur leurs patrons qui ont nom Proust ou Gide, ne liront jamais, car les sangs sont incompatibles, sur la nécessité de distinguer vérité factuelle et morale.
Puisque nous avons fait allusion à l’époque de la Lucrèce, dont le lascif Hugo a fait une pièce polissonne, qu’il soit su que le docteur Martin dont on célèbre la date de l’affichage, sur la porte d’une église, de ses thèses, en 1517, événement dont, de reste, il ne fait jamais mention dans ses œuvres, met à coté du nom du Pape Borgia Alexandre VI, dans ses Propos de Table (Tischreden), entre parenthèses, la qualité de maranne.
Remarquons ce qui est dit de la fête du 15 août, qui aurait pu et devrait être celle de la France, après la consécration du pays à la Vierge. Il en ressort que la prétendue antiquité honorait la même réalité et cela se comprend mieux si l’on suit l’idée de Voltaire que les livres sacrés enseignent la morale, et non pas la physique, à laquelle l’on peut annexer l’histoire comme physique sociale.
Deux questions heurteront le sentiment patriotique qui se résume chez nous à des fables et non comme ailleurs en Iran, Finlande ou Germanie à une épopée littéraire, Jeanne d’Arc ou des Lys et la seconde survivance, celle de Louis XVII ont agité les âmes. L’auteur réfute dans les deux cas leur survie. Il ne mentionne pas, sauf inattention de notre part, l’œuvre fort bien travaillée de Xavier de Roche que nous connûmes, avec sa femme, sur cette question du dauphin ayant emprunté le nom d’un déserteur prussien, Naundorff. Au cimetière de la charmante Delft est sa tombe avec la mention de sa qualité royale, sa naissance à Versailles ; son fils porta le nom de Bourbon, dans la cavalerie hollandaise aux Indes, là même ou mourut, du vivant de son père, le fils naturel du philosophe Hegel.
En revanche, est cité l’ouvrage de feu Pierre de Cermoise, qui nous a dit, à l’ancienne Librairie des Deux Gares, boulevard de Magenta, tenue par feu Roger Hirlam et notre vieux camarade et ami breton, son fils Gérard, que l’héroïne française était inhumée dans sa demeure ancestrale lorraine, derrière la chapelle. Pour notre part, une mention du vers de Shakespeare dans son Henri VI, qui spécifie, dans la bouche de l’héroïne, que Jeanne ne fut pas bergère mais reine, aurait mérité d’être faite.
“But issued from the progeny of kings” (v. 2709)
On songe à cette parole d’Auguste Comte que le mythe de Jeanne d’Arc devait se substituer à celui de Napoléon, et au noceur Gambetta, de ne pas toucher au mythe de Jeanne d’Arc !
Il va de soi que la littérature française n’est pas en état d’imaginer l’hypothèse de l’École de la Nouvelle Chronologie de l’Académicien russe qui biffe de notre francité Jeanne et son compagnon d’arme Gilles de Rais pour les transposer en Russie, mais ce n’est pas demain que l’on slavisera, si l’on nous permet de plaisanter, et Jeanne et aussi l’héroïne de la fable de Mardochée (Marx en contraction), Esther, en faisant de la dernière la “Clinton”, pour ainsi dire de la secte russe des dits Judaïsants, une tsarine menant l’assaut contre l’État chrétien, et qui échouèrent dans leur complot ! Ce n’était, direz-vous avec raison, que partie remise !
Est posée, comme à chaque génération, la fameuse question de l’authenticité des Protocoles de Sages, qui seraient d’un certain Cyon ! Tout y est bien détaillé. Il faut dire que le sujet est, pour user d’un mot de Wagner sur le communisme, dangereux à traiter, “polizeigefährlich” : le texte est interdit à la vente depuis l’affaire de la profanation d’une sépulture du cimetière de Carpentras dans laquelle est bien éclairée la malignité de François Mitterrand, comme Paul-Éric Blanrue le démontre, et fait songer à la formule du noble Koran que chaque peuple a le maître qu’il mérite. À nos yeux, ce chapitre sur l’affaire de Carpentras est le plus dramatique et instructif de tous, et se lit aisément comme une réflexion continue et non pas une réflexion de journaliste.
Hic Rhodus, hic salta ! L’obstacle enfin, combien périlleux, du moins en France où tout sert à chicane, comme dans une basse-cour ! Ce fameux brûlot de Protocoles sera toujours discuté, et une partie de son style imité du dialogue du certain Joly, de lignée jurassienne, sur Machiavel aux Enfers met chacun d’accord sur l’existence de l’original français en Russie révolutionnaire, l’amant de la sœur de Lénine, Kerensky, qui n’avait rien de chrétien, en fit un motif de condamnation à mort, et un second motif de flatterie nationale, dont l’auteur qui n’aime pas à parler de voyance, ne parle pas, est cette fantastique prévision de la carrière de Léon Bourgeois, “notre meilleur agent” (sic), alors cité par l’auteur du pamphlet, qui était naguère un best-seller au Liban, chez un éditeur chrétien. Cet ancien préfet anticlérical Bourgeois, de famille immigrée d’Allemagne, comme nous l’avons lu sur un site allemand pro-maçonnique, mais scrupuleux et solide, est épinglé, dans ce pamphlet comme favorisant l’enseignement par l’image. C’est le seul nom, hormis Alexandre ou peut-être César, cité entre les Modernes, à travers les siècles, et on le retrouvera Président du Conseil, plusieurs fois ministres, ce qui n’a rien d’extraordinaire, direz-vous, auteur d’un livre sur le principe de Solidarité que citait, en admirateur, Thierry Meyssan, à bon droit, et last but not least, premier Président de la Société des Nations. Disons que le faussaire russe était perspicace, et bien doué, d’imaginer en 1897 la fortune de l’homme de l’année 1919 !
L’ours allemand contre la bête de Rome !
Comme dans tous les livres de quelque importance – et pas seulement dans l’œuvre complète de Martin Heidegger – l’aquarelliste né à Branau et chancelier est cité, et sur sa mort, l’auteur est raisonnable, en éloignant toute hypothèse de fuite : pourquoi ne pas citer, pour couper court aux fantasmagories, la phrase de Mon Testament Politique dictée devant témoin dans lequel il annonce la décision commune avec sa femme, pour échapper à la honte de la dégradation, de se donner la mort ?
Nous ne nous proposons pas d’examiner tout l’ouvrage, mais d’ajouter quelques réflexions à celles de Paul-Éric Blanrue, avec ce sentiment que les nombreux points débattus me paraissant une sorte de panorama de ma propre génération ! Qui dispute encore de la survivance de Louis XVII, l’enfant-martyr dont la mère que nos têtes pyramidales de sophistes en chaire font passer pour une étourdie et une femme écervelée, alors qu’elle a donné la meilleure définition, en quelques lignes françaises adressées à son frère Léopold, Empereur d’Allemagne, de la conjuration qui réussit maintenant à modifier les couleurs catalanes en drapeau porto-ricain ! N’en parlons pas, mais pensons-y toujours ? Qui s’occupe du Comte de Chambord, dans un pays qui fut royaliste profondément ? Et qui, sous les préaux d’école, oserait, sans effaroucher les Illuminés du jour, soutenir que Galilée fut condamné, non pour sa science, mais sa superstition de vouloir trouver dans les forceries bibliques la preuve de la théorie déjà grecque, avec Aristarque de Samos, de l’héliocentrisme. Le rôle protecteur du Pape, ami et partisan de cette théorie juste mais soutenue par un vaniteux entêté, aurait pu être mise mieux en relief.
Pourquoi donc les ânes de la Curie ne mettent-ils pas ce fait en avant au lieu de se laisser insulter par ceux que notre Pascal taxait de semi-habiles, ou La Bruyère d’esprits forts ? Il est des fois où, pour reprendre un vers français qui nous vient vaguement en tête du Grand Frédéric, roi en Prusse, on en vient à célébrer : L’ours allemand contre la bête de Rome !
Je laisse aux lecteurs le soin d’entrer dans cette salle de fantômes que nous lui ouvrons, plus consistants que nos contemporains en marche ! Car si la vérité, comme la philosophie, pour paraphraser Cicéron sur Socrate, descend du ciel sur terre, la déesse de la justice pour les vrais Hellènes, Thétis, préfère s’exiler et briller près des astres, que pourrir dans cette « sentine de l’univers », expression tirée d’un conte persan cité par notre cher et honnête Kant pour qualifier la terre !
Pierre Dortiguier