Cette affaire effrayante démontre à quel point les services secrets sont médiocres. Ils font preuve d’un amateurisme confondant qui ne laisse rien augurer de bon pour le futur.
Mis en cause dans l’affaire Skripal ou l’attaque des serveurs démocrates durant la campagne américaine, le renseignement russe montre ses faiblesses.
Rien ne transparaît derrière la façade anonyme de l’unité militaire 45-807, le siège moscovite de la direction du renseignement militaire russe, plus connue sous son vieil acronyme soviétique, le GRU. Mais à l’intérieur, l’heure est plutôt au branle-bas de combat depuis que les noms de plusieurs dizaines de ses agents clandestins ont été révélés, et leurs visages parfois exposés sur la place publique.
En l’espace de quelques semaines, 305 agents sont ainsi sortis malgré eux de l’anonymat, auxquels il faut ajouter douze agents inculpés aux États-Unis, quatre autres expulsés des Pays-Bas, et deux, enfin, recherchés par le Royaume-Uni. Du jamais-vu.
« Seulement 305 agents ont été révélés, mais aujourd’hui plus d’un millier sont paralysés », précise Roman Dobrokhotov, rédacteur en chef du site d’investigation russe The Insider. Ce dernier, en association avec Bellingcat, un site britannique, est à l’origine d’une bonne partie des fuites.
Leur travail en commun a notamment abouti, mi-octobre, à la divulgation, photos et témoignages à l’appui, de l’identité des deux agents du GRU, Anatoli Tchepiga, alias « Rouslan Bachirov », et Alexandre Michkine, alias « Alexandre Petrov », suspectés d’avoir tenté d’empoisonner un ancien de la maison devenu un agent double, Sergueï Skripal, et sa fille, Youlia, en mars, à Salisbury, en Angleterre. Cette affaire a déjà conduit à la plus vaste expulsion coordonnée de diplomates russes d’Occident.
Isabelle Mandraud – Le Monde