C’est un secret de polichinelle, un grand nombre de journalistes, de professeurs, d’acteurs associatifs… sont des agents des services secrets français. Dès que l’un d’eux se fait attraper, la machine de propagande se met en branle pour condamner moralement et politiquement les dirigeants du pays espionné. Rien de tel que l’image des journalistes emprisonnés, journalistes transformés en héros de la liberté et de la démocratie alors qu’ils étaient là en service commandé, pour espionner. Systématiquement, 20 ou 30 ans plus tard, bien après les faits, nous apprendrons que la personne emprisonnée ou assassinée était bien un espion.
ENQUÊTE – L’animateur de « La chasse aux trésors » aurait bien été exécuté au Zaïre en 1985…
Une des dernières pièces du puzzle. Une enquête de la journaliste Anna Miquel pour le magazine XXI, publiée demain, apporte la preuve que Philippe de Dieuleveult, animateur vedette de « La chasse aux trésors» dans les années 1980 et agent de la DGSE (Direction générale de la sûreté extérieure), a été arrêté par les services secrets zaïrois en 1985. Et aussi certainement exécuté, en même temps que ses sept compagnons. Cette version contredit la thèse de la noyade qui se serait produite lors de l’expédition Africa Raft, dans les rapides d’Inga au Zaïre, ou celle de la bavure de militaires zaïrois.
Après quatre ans d’enquête et deux séjours dans l’actuelle République démocratique du Congo, Anna Miquel a pu retrouver et faire parler des membres de la garde rapprochée de l’ex-dictateur Joseph-Désiré Mobutu qui ont participé à l’arrestation et à l’exécution du groupe.
« Je suis arrivée au moment où les gens pouvaient parler », explique la journaliste. Elle a ainsi pu se procurer un procès-verbal d’interrogatoire de Philippe de Dieuleveult, daté du 8 août 1985, soit deux jours après sa noyade « officielle ». La signature de l’animateur, sur document à en-tête de la Division spéciale présidentielle de Mobutu, a été authentifiée par son frère Jean (lire son témoignage en cliquant ici).
Abandonné à son sort« Aujourd’hui, la certitude que j’ai, c’est qu’ils ont été exécutés, ce n’est pas une bavure de militaires incontrôlés », assure Anna Miquel, qui a recueilli des témoignages concordants faisant état de l’exécution des sept hommes après cet interrogatoire.
Reste la question du mobile, et là, il manque encore des éléments. L’enquêtrice a une conviction: « Je ne pense pas que les sept membres de l’expédition étaient des espions, mais je pense que Philippe de Dieuleveult, qui travaillait pour la DGSE, était en mission pour une opération de repérage ou de diversion. Il n’était qu’un maillon de la chaîne. Et Mobutu n’a pas fait d’erreur en le prenant pour un espion. Philippe de Dieuleveult a été dénoncé et abandonné à son sort.»
Corps
Un corps dans un état de décomposition avancé, sans tête, sans mains, sans visage, et censé être celui de Dieuleveult a été renvoyé à la famille en 1985. Des examens ont montré qu’il s’agissait d’un Africain, révèle XXI
David Carzon – 20 minutes – Publié le 15/10/2008