Paul François Vs Monsanto : déjà 12 ans de combat !

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Encore une victime des poisons de Monsanto, un agriculteur dont la santé a été détruite et qui est obligé de passer par le délirante justice française, une des plus lentes au monde ! Quand on pense que des milliers d’agriculteurs sont pour les produits de Monsanto, pour le Roundup on comprend vite que le problème ne vient pas des firmes multinationales mais du peuple !


L’agriculteur intoxiqué par un herbicide fait face au géant des OGM en appel, ce mercredi.

Son avocat espère que la justice « mettra un coup d’arrêt aux pratiques des firmes ».

« Je suis déterminé, mais je suis aussi fatigué, il faut que ça se termine », souffle Paul François. Ce mercredi, le céréalier charentais qui a osé attaquer Monsanto en justice en 2007, trois ans après avoir été gravement intoxiqué avec son herbicide Lasso (désormais interdit), montera pour la deuxième fois les marches de la cour d’appel de Lyon. Et il espère bien que ce sera la dernière. « Ces douze ans de combat ont bouffé ma vie, et celle de Sylvie [sa femme morte en septembre d’une rupture d’anévrisme, ndlr], qui m’a soutenu, a subi, et ne sera pas là pour en voir l’issue », raconte l’agriculteur, la gorge serrée.
En 2004, il inhale les vapeurs du pesticide en vérifiant une cuve. Depuis, il vit un calvaire : amnésie, vertiges, bégaiement, coma à répétition… Et se dit victime d’un « harcèlement judiciaire » de la part de Monsanto, aujourd’hui propriété de l’Allemand Bayer.

Dangereux

En 2012, jugé responsable du préjudice de Paul François pour manquement à l’obligation d’information sur les risques liés au Lasso, le géant des OGM et des pesticides est condamné à l’indemniser entièrement, une première mondiale. Mais Monsanto fait appel. Quand le jugement est confirmé en 2015 par la cour d’appel de Lyon, la multinationale se pourvoit en cassation. En juillet 2017, la Cour de cassation annule la décision d’appel et lui renvoie la balle, arguant d’une erreur de forme : les juges lyonnais auraient dû vérifier si le Lasso était défectueux ou non.

Aujourd’hui, l’avocat de Paul François, Me François Lafforgue, dit avoir « bon espoir » que son client obtienne gain de cause. Selon lui, « tous les éléments sont réunis » pour engager la responsabilité de Monsanto sur le fondement préconisé par la Cour de cassation. Depuis un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 9 juin 2017, « un faisceau d’indices est suffisant », ce qui est a priori favorable aux victimes. Il reste, pour l’avocat, un point délicat : « Le risque de développement, qui permettrait d’arguer que l’état des connaissances scientifiques n’aurait pas permis à Monsanto de savoir que le produit pouvait être dangereux.» Mais Me Lafforgue se dit là aussi confiant : « La dangerosité du Lasso était connue et constatée dans toute la littérature scientifique, insiste-t-il. L’Institut national de la recherche scientifique avait établi une fiche toxicologique dès 1993 sur la dangerosité du monochlorobenzène, le solvant présent dans le Lasso. Et l’alachlore, le principe actif du Lasso, avait fait l’objet d’un retrait du marché au Canada dès 1985, puis en 1990 en Belgique et en 1992 au Royaume-Uni. »

« Flagrant »

Si le délibéré de la cour d’appel de Lyon, attendu dans les deux mois, était favorable à Paul François, quelles seraient les conséquences ? « Il n’est pas certain qu’on puisse étendre cette jurisprudence à l’infini, car Paul François a été victime d’une intoxication aiguë, or la plupart des maladies liées aux pesticides sont dues à une exposition chronique à plusieurs produits de nombreux fabricants », concède l’avocat. Il espère toutefois que « cela [marque] un coup d’arrêt aux pratiques des firmes et [constitue] un préalable intéressant pour les victimes ».

Restera l’épineuse question de l’indemnisation. Les victimes sont aujourd’hui sous-indemnisées, même lorsque le caractère professionnel de leur maladie est reconnu. C’est l’autre combat du céréalier charentais, qui se bat avec son association, Phyto-Victimes, pour la création d’un fonds d’indemnisation des agriculteurs victimes des produits phytosanitaires, abondé par les firmes. Pour l’instant en vain. La semaine dernière, une proposition de loi de la sénatrice PS Nicole Bonnefoy portant sur la création d’un tel fonds devait être débattue à l’Assemblée nationale. Las, la ministre de la Santé a demandé un report de l’examen de ce fonds au prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, en septembre. De quoi faire enrager Paul François : « C’est honteux et irrespectueux des victimes, le gouvernement veut continuer à gagner du temps pour protéger les industriels », s’insurge-t-il. Selon lui, les fabricants de pesticides « savent qu’un fonds d’indemnisation ouvrirait une boîte de Pandore par rapport aux milliers d’agriculteurs victimes des pesticides, mais aussi aux riverains : si pour la première fois au monde, on se mettait à taxer les industriels pour indemniser les victimes, cela reviendrait à dire qu’ils ont leur part de responsabilité ».

L’agriculteur, qui se dit de centre droit, affirme être « très déçu » par le gouvernement Macron : « On n’a jamais autant reculé sur les pesticides que depuis qu’il est en place, malgré ses grands discours. » Dès l’été 2017, il avait été « choqué » par le fait que le risque chimique a été effacé du compte pénibilité. « Le ton était donné : on ne touche pas à la chimie dans ce pays, donc on ne touche pas aux pesticides. Le gouvernement roule pour les industriels, ça n’a jamais été aussi flagrant. » Pour protéger la population des pesticides, il estime que « la société civile, les citoyens et la justice iront plus vite que les politiques ». En attendant, Paul François espère obtenir justice face à Monsanto.

 

Photo d’illustration : Paul François, dans son exploitation de Bernac (Charente) en 2017. Photo Claude Pauquet. Vu pour Libération

Coralie Schaub – Libération

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