Le cas de ce monsieur est vraiment anecdotique car, dans les faits, ils sont très nombreux à être mis en examen ou à avoir un casier judiciaire lourd. Mais il est très intéressant d’observer que ce monsieur présidera aujourd’hui à l’Assemblée nationale sa première séance alors qu’il est impliqué dans une affaire de corruption. C’est un très bel exemple à donner surtout lorsqu’on inaugure le quinquennat avec une loi de moralisation de la vie politique.
Richard Ferrand et Marielle de Sarnez ne sont pas les seuls députés concernés par une enquête.
Il y a aussi Bernard Brochand, qui présidera mardi 27 juin la première séance de l’Assemblée nationale en tant que doyen d’âge…
Tout un symbole. Après l’exfiltration de Richard Ferrand et de Marielle de Sarnez du gouvernement vers l’Assemblée où ils pourraient prendre, malgré les enquêtes préliminaires les concernant, respectivement la tête des groupes parlementaires LREM et MoDem, un troisième député visé par une enquête sera à l’honneur ces prochains jours. Il s’agit de Bernard Brochand, 79 ans, député Les Républicains (LR) des Alpes-Maritimes. Lui est cité dans une affaire de corruption. Le mardi 27 juin, ce cacique du Parlement aura néanmoins le privilège de présider la première séance de la nouvelle législature, en tant que doyen d’âge du nouvel hémicycle. Comme le veut la tradition (et le règlement de l’Assemblée nationale), il pourra donc tenir un discours d’une trentaine de minutes et superviser l’élection du nouveau président de l’Assemblée.
Durant son allocution, Bernard Brochand ne sera peut-être pas en mesure d’éclairer les nombreux nouveaux sur le travail parlementaire : selon le décompte de l’association Regards citoyens, il se classe en effet avant-dernier des députés de la législature sortante en termes de présence à l’Assemblée, et même dernier en interventions dans l’Hémicycle ! En revanche, il pourra vanter auprès de ses nouveaux collègues les bienfaits de l’immunité parlementaire. Il y a trois ans, les juges ont demandé à lever la sienne pour interroger sous le régime de la garde à vue le député dans une affaire de corruption. Ce dossier concerne les conditions d’obtention en 2013 d’une convention de travaux par une boîte de nuit de Cannes, à une époque où il était maire de la ville. Les magistrats ont notamment mis la main, a rapporté le JDD, sur des emails datant de 2011 montrant que les tenanciers auraient eu accès aux conditions d’un appel d’offres municipal… dix-huit mois avant qu’il ne soit lancé. Mais le 16 avril 2014, le bureau de l’Assemblée refuse la levée d’immunité de l’élu. A ce jour, il n’a donc pas été mis en examen ni même entendu dans cette affaire.
En 2013, Bernard Brochand a également été épinglé par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique pour avoir possiblement dissimulé d’importants avoirs en Suisse. Il s’était défendu de toute fraude en expliquant avoir disposé dans le passé d'”un compte à l’étranger, déclaré en France, avec des impôts payés en France“.
Les cas Ferrand, Sarnez et Solère
Aussi anecdotique soit-elle, la présence de Bernard Brochand au perchoir mardi résonne avec l’arrivée en force de députés inquiétés par la justice aux postes-clés de l’Assemblée. Les trois personnalités pressenties pour diriger les groupes parlementaires de la majorité sont en effet toutes dans le collimateur de la justice. Richard Ferrand, probable futur président du groupe LREM, est sous le coup d’une enquête préliminaire au sujet de petites combines à la tête des Mutuelles de Bretagne en 2010. Quant à Marielle de Sarnez, elle est visée par une une enquête préliminaire dans l’affaire des emplois fictifs présumés du MoDem, mais est pressentie pour prendre la tête du groupe centriste à l’Assemblée.
La figure de proue du nouveau groupe UDI-“Les Républicains constructifs”, Thierry Solère, est aussi concernée. Candidat à la présidence de la formation parlementaire alliée à la majorité d’Emmanuel Macron, le député des Hauts-de-Seine est lui aussi visé par une enquête du parquet de Nanterre, pour fraude fiscale. En février dernier, le Canard enchaîné a révélé que le parlementaire est soupçonné d’avoir omis de déclarer une partie de ses impôts entre 2010 et 2013. Thierry Solère s’est dit “parfaitement à jour” dans le règlement de ses impôts et a annoncé son intention de porter plainte contre l’hebdomadaire.
Si ces parlementaires restent bien sûr présumés innocents, la coïncidence de leurs situations est troublante. Et c’est un comble pour […]
Étienne Girard – Marianne