Le scrutin présidentiel du 12 décembre 2019 a enregistré un taux de participation de 39,83 %, le plus faible de l’histoire des scrutins algériens, selon les chiffres déjà exagérément gonflés communiqués par une administration dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle souffre d’absence totale de neutralité. Il faut rappeler qu’un huitième des votes étaient blancs ou nuls et que les votants étaient surtout de jeunes militaires de la conscription ainsi que des fonctionnaires des corps constitués. De plus, trois wilayas (départements) – Tizi-Ouzou, Bouira, Béjaia -avaient rejeté carrément le scrutin qui n’a donc pas eu lieu dans ces trois wilayas.
Peut-on imaginer qu’en France, un président soit élu sans la participation de trois départements entiers ?
C’est dire !
Malgré le boycott observé massivement par le Hirak*. Abdelmadjid Tebboune a été « élu » et imposé contre la volonté populaire et installé au palais d’El-Mouradia par les généraux de la junte -3içaba-, la mafia à la tête du vrai pouvoir et dont Tebboune sert de vitrine civile soft.
D’une santé chancelante, acquiesçant volontiers aux ordres venant des Tagarins*, Tebboune ce gérontocrate de 75 ans fait figure de pantin et n’a même pas la main sur son propre gouvernement que lui même avait ouvertement critiqué à la veille de son retour en Allemagne et dont il vient d’opérer quelques remaniements mineurs.
Jamais les Algériens n’ont connu une répression aussi aveugle, se traduisant par des interpellations pour le moindre message hostile au régime posté sur les réseaux sociaux et des arrestations massives de « hirakistes* » accusés abusivement de porter atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté nationale, se soldant par des condamnations à des peines privatives de liberté prononcées par une justice aux ordres et instrumentalisée.
C’est de ce personnage, rejeté par le Hirak et adoubé par les généraux, dont parle Emmanuel Macron en des termes fort élogieux, le qualifiant même d’« homme courageux ».
Est-ce pour avoir permis l’usage de la torture et la commission de viols dans les sous-sols des services de « sécurité » sur ses propres concitoyens que Macron le traite de courageux ?
Serait-ce aussi parce qu’il a accepté le réengagement des militaires algériens dans la Task force au Sahel, alors que l’Algérie s’est toujours interdit jusque-là à intervenir en dehors de ses frontières ?
Les Algériens s’en souviendront !
Mais, voilà que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies vient de réclamer ce vendredi aux autorités algériennes de mettre immédiatement fin aux violences contre des manifestants pacifiques et de mettre fin aux détentions arbitraires.
Les médias français ne relaient pas cette information et les politiques ferment les yeux sur les agissements criminels d’un régime dictatorial et oppresseur.
Le Hirak exige avec force et constance la chute de ce régime honni et la fondation d’une deuxième république édifiée sur un État de droit, un État civil démocratique et social.
Du reste, cette revendication n’est pas récente puisqu’avant même que l’Algérie ne recouvre son indépendance, durant le Congrès historique de la Soummam tenu du 13 août au 20 août 1956, une plateforme politique avait été dégagée par les participants, proclamant la primauté du civil sur le militaire et celle de l’intérieur sur l’extérieur. C’est la violation de ce principe fondamental dès le Congrès de Tripoli du 28 mai 1962 et par la suite le coup de force dirigé contre le gouvernement du Président légitime Benyoucef Benkhedda en juillet 1962 qui ont permis d’asseoir un régime militaire, faisant fi des aspirations populares démocratiques.
D’où le slogan phare du Hirak scandé par des millions d’Algériennes et d’Algériens pacifiques chaque vendredi et tous les mardis par les étudiantes et les étudiants. : « Dawla madaniya Machi 3askariya ! » (État civil et non militaire !)
*Les Tagarins, siège du ministère de la Défense nationale
*El Mouradia : siège du palais présidentiel
*Hirak : Révolution populaire pacifique, dite Révolution du sourire
*Hirakistes : activistes du Hirak
Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies a réclamé vendredi aux autorités algériennes de mettre immédiatement fin aux violences contre des manifestants pacifiques et d’arrêter les détentions arbitraires, rapporte l’AFP.
« Nous sommes très préoccupés par la détérioration de la situation des droits de l’homme en Algérie et par la répression continue et croissante contre les membres du mouvement pro-démocratique du Hirak », a déclaré Rupert Colville, un porte-parole du Haut-Commissariat lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève, cité par la même source.
M. Colville a fait état de « rapports crédibles » selon lesquels près d’un millier de personnes ont été poursuivies pour avoir participé au Hirak ou pour avoir publié des messages critiques à l’égard du gouvernement sur les réseaux sociaux mais aussi qu’ »au moins 32 individus sont actuellement détenus pour l’exercice légitime de leurs droits fondamentaux, et certains d’entre eux sont passibles de longues peines, tandis que d’autres sont toujours en détention provisoire ».
Le Haut-Commissariat a aussi reçu « des allégations de torture et de mauvais traitements en détention, y compris de violences sexuelles ». Par conséquent, il appelle à cesser tout recours à la violence contre des manifestants pacifiques et « à mettre un terme aux arrestations et détentions arbitraires ».Il demande à l’Algérie à commencer par « la libération immédiate et sans condition de toutes les personnes arrêtées ou détenues arbitrairement pour leur soutien présumé au Hirak, et à abandonner toutes les charges retenues contre elles ».
L’agence onusienne demande aussi des enquêtes « rapides, impartiales et rigoureuses » sur les allégations de torture et de mauvais traitements en détention et elle enjoint les autorités algériennes à abroger les textes qui sont utilisés pour poursuivre des personnes qui ne font qu’exprimer leur opinion et exercent leur droit de réunion pacifique.
L’ONU fait état de centaines de personnes arrêtées depuis la reprise des manifestations en février dernier, et d’au moins 2500 personnes arrêtées ou détenues entre 2019 et 2020 pour avoir participé aux manifestations pacifiques du Hirak.
Le Haut-commissariat des droits de l’Homme de l’ONU indiqué également que les procédures pénales engagées en 2019 et 2020 contre des militants, des défenseurs des droits de l’homme, des étudiants, des journalistes, des blogueurs et des citoyens ordinaires qui ont exprimé leur opposition se sont poursuivies pendant les deux premiers mois de 2021, constate encore l’institution onusienne.
Pour rappel, 59 détenus du Hirak ont été libérés récemment dans le cadre de la grâce présidentielle décrétée par le président Tebboune. Certains détenus libérés provisoirement risquent de retourner en prison, alors que les autorités ont continué d’arrêter des militants et des activistes du Hirak.
À noter que l’Algérie n’a pas encore réagi à la demande du Haut-commissariat de l’ONU qui réclame la libération des détenus du Hirak et de cesser les violences, les arrestationsiçaba et détentions arbitraires des manifestants.
5 mars 2021