Récemment, dans le Grand Journal, sur la chaîne cryptée, au côté d’Agnès Soral, Luc Ferry a évoqué « le pire tabou », celui de « la question de l’antisémitisme », selon lui. Mais cette question n’est pas tabou, Luc, puisque l’antisémitisme on en parle matin, midi et soir dans tous les médias. Le pire tabou est bien plutôt la question du peuple qui se dit élu. Ce n’est pas pareil. Et cette question est tellement tabou que notre ex-ministre n’ose même pas la nommer ! Question d’autant plus délicate que d’aucuns parmi les Juifs ne se considèrent pas particulièrement élus. Cette question de la croyance en l’élection divine et en sa transmission par le sang de la mère juive doit d’autant plus être étudiée que ministres et ex-ministres hurlent à longueur de journée leur combat sans merci pour la laïcité. Mais leurs hurlements de vendus ne doivent pas nous empêcher d’examiner laïquement cette question, à l’instar de Spinoza, ce génie juif hollandais qui réfuta avec beaucoup de bon sens l’élection du peuple qui se dit élu. Dans mon livre Et le bon grain tua l’ivraie (Éditions Bellicum, 2012), j’ai modestement essayé d’élucider cette question ; j’en produis ici un extrait :
Malraux l’avait prophétisé entre deux prises de cocaïne : « le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas ». Et effectivement, ce siècle est devenu profondément religieux, voici sa religion : la version officielle de la Shoah, la version officielle des attentats du 11 septembre et la version officielle de la légitimité de l’État d’Israël. Comme toute religion, celle-ci a ses hérétiques et ses inquisiteurs. Ces derniers sont tellement radicaux qu’ils tolèrent difficilement que soit soulevée la seule question de la politique israélienne, mais ils le tolèrent quand même pour confiner l’hérésie à cette seule question et masquer ainsi la question la plus tabou, celle du peuple qui se dit élu.
Le peuple qui se dit élu dit avoir reçu la parole divine et été témoin de la manifestation divine pour garder et transmettre cette parole et ce témoignage, et ayant été élu pour cela, il ne peut se tromper. Son infaillibilité quant à la connaissance du divin ne peut donc être mise en question. Seul lui a cette connaissance infaillible, la disparition du peuple élu serait ainsi une perte irréparable, il peut et doit donc survivre parmi les nations par tous les moyens. Les autres peuples peuvent périr du moment que le peuple élu perdure. Tout peut périr excepté le peuple élu ; l’élection divine ne périt pas, elle est éternelle. Il peut commettre les pires abominations contre les autres peuples, son élection ne sera pas mise en cause puisque éternelle. Sa culpabilité aussi lourde soit-elle ne l’empêchera pas d’être sauvé puisque élu. Il est déjà sauvé quoi qu’il commette. Ses actes n’ont aucune conséquence puisque son salut lui est acquis à tout jamais, quand bien même une décision divine annulerait cette élection. Le peuple élu a foi en son élection avant d’avoir foi en son Créateur, ce dernier ayant un devoir envers son peuple, devant le servir obligatoirement et devenant ainsi le serviteur d’un peuple qui règne donc à sa place. Le peuple élu se considère donc comme le peuple divin, le peuple qui règne, son créateur ne pouvant pas lui-même régner (sur Terre) mais seulement créer (et dont la création et au service du peuple élu !). Mais vouloir régner à la place de son créateur, tel est précisément le désir de Satan. Mais pour le peuple élu, Satan n’existe pas, n’existent que des mises à l’épreuve envoyé par son créateur. Cependant, le peuple élu peut sombrer dans les pires perversions, avidités, mensonges, mauvaise foi, manipulations, crimes… il peut défier son créateur par l’immoralité la plus extrême, subir les pires épreuves, il reste élu. Et les persécutions n’y changeront rien, au contraire elles sont pour lui la confirmation de l’élection ! Sa certitude d’être élu le fait d’autant plus tomber dans les bras de Satan qu’il (le peuple élu) ne croit ni au Diable ni à l’Enfer.
Selon la Torah, livre sacré du peuple qui se dit élu, il n’y a pas d’autre vie après la mort, les âmes des défunts, celle des justes comme celle des criminels, tombent dans le Schéol dénuées de toute vie et s’y éteignent, sans châtiment ni récompense, sans bonheur ni malheur ; il n’y a donc de vie que terrestre pour le peuple divin, et cette vie matérielle lui est divine, c’est pourquoi il y est si aveuglément attaché. La récompense du peuple élu ne peut ainsi être selon lui que terrestre : la terre promise (il ne peut envisager que la terre promise soit un monde intérieur… dans le cœur, un bien spirituel et non un bien matériel). Et son salut ne peut être que matériel : la domination sur les autres nations, par le moyen de l’argent indique le Deutéronome (23, 21) : « vous pourrez exiger des intérêts de l’étranger (non-juif) mais pas d’un frère (juif) », « vous prêterez à beaucoup de nations et vous n’emprunterez point. Le Seigneur fera de vous la tête et non la queue » (Deut. 28, 12-13). Et comme les nations se sont formées partout de par le monde, cette domination ne peut être que mondiale, par le prêt à intérêt et l’endettement. Ainsi lorsque le juif américain Lloyd Blankfein, directeur de Goldman Sachs, la plus puissante banque d’affaires internationale, déclare « n’être qu’un banquier qui fait le travail de Dieu », il se réfère directement au Deutéronome.
Mais au sein des nations ainsi dominées par l’argent et par leur salut matériel (devenue la seule modernité), cette domination est dénoncée ou menacée, le peuple qui se dit élu n’est pas reconnu comme tel, le guide de la foi et du salut spirituel. Il a alors recours, pour se faire reconnaître, à la manipulation (affaire Lavon), la culpabilisation (faux acte antisémite du rabbin Farhi, automutilé, d’Alex Moïse, autoinsulté, de Raphaël Benmoha, autoincendié), la force (assassinat du comte Folke Bernadotte médiateur de l’ONU, torpillage du USS Liberty, agressions sanglantes par les milices du BETAR et de la LDJ, massacres de civils à Deir Yassine, Rafah, Gaza, sud-Liban… ) et au lobbying (AIPAC, ADL, B’naï B’rith, CRIF… ). Ces manœuvres et ces intimidations sont telles que l’on ne peut plus prononcer le seul mot « juif ». Cet « imprononçable » est bien la preuve qu’ils ne peuvent obtenir la reconnaissance avec toutes ces manœuvres. Si cette élection divine, raciale, transmissible par le sang de la mère, ne peut être reconnue malgré tous les recours possibles et imaginables, y compris les plus condamnables, c’est qu’elle n’existe donc pas. Le peuple qui se dit élu sait cela et redoute le moment où les autres le sauront aussi. Il maintient le mensonge par son fascisme financier, le dernier fascisme, le plus violent, le plus totalitaire, qui hurle l’antifascisme pour dévaster les nations, mais qui donne des signes d’effondrement : chute de Lehman Brothers, Madoff… Cependant le peuple qui se dit élu ne veut pas voir son désespoir qui arrive ; « lorsque vous verrez ce qui se passera, la terreur remplira vos cœurs », les prévient pourtant le Deutéronome (28, 67). Comme il les avait déjà prévenus (Deut. 28, 45) : « tous ces malheurs s’abattront sur vous et s’acharneront contre vous jusqu’à ce que vous soyez exterminés »… Dont acte.