Ladar Levison, fondateur de Lavabit, invite les médias à découvrir les agissements illégaux du gouvernement américain.
Ladar Levison est dans une posture pour le moins particulière. A 32 ans, il vient de tuer le service qu’il a mis 10 années de sa vie à construire. Toute sa vie d’adulte a été dédiée à la création d’un service de mails et de stockage encryptés. Un service qui a récemment été mis sous le feu des projecteurs pour avoir été utilisé par Edward Snowden, l’analyste renégat de la NSA. Le service a connu son heure de gloire, avant que son fondateur ne reçoive la visite d’agents du gouvernement.
Il s’est vu proposer un choix assez cynique : collaborer avec la NSA ou faire face à d’importantes poursuites judiciaires. Ladar Levison a préféré mettre fin au service plutôt que de compromettre les informations de ses clients. Il va comparer cette décision à celle de mettre fin à la vie d’un animal aimé.
http://www.youtube.com/watch?v=Ui3KpztUzVg
Ladar Levison : un discours en pointillé
Aucune révélation tonitruante n’est à attendre de la part du fondateur de Lavabit. Et pour cause, il ne peut tout simplement pas s’exprimer librement sur la situation. Dans une apparition télévisée pour l’émission « Democracy Now » il se montrera accompagné de son avocat. Ce dernier va plusieurs fois intervenir pour empêcher Levison d’aborder certains sujets. En réalité il expliquera qu’il y a une frontière mince qui le sépare de sujets qui pourraient lui valoir de longues années d’emprisonnement. En effet, après avoir mis fin à son service, il n’est aujourd’hui pas autorisé à divulguer les demandes qu’il a reçu du gouvernement.
« Il y a des informations que je ne peux même pas partager avec mon avocat, expliquera-t-il. Donc encore moins avec les citoyens américains. Si nous devons parler de secret, vous savez, je pense que c’est poussé à l’extrême par l’administration actuelle pour couvrir des méthodes dont ils ne sont pas fiers. »
Une invitation à fouiner
Ladar Levison n’en dira pas davantage donc, cédant à la menace d’années d’emprisonnement. Son discours sera pourtant d’encourager la presse à trouver la vérité sans lui :
« Je ne peux malheureusement pas en parler. Je le voudrais, croyez-moi. Je pense que si les américains savaient ce que fait le gouvernement, celui-ci ne serait plus autorisé à le faire. J’espère que les médias pourront découvrir ce qui se passe sans mon aide. »
Nous ne pouvons donc que suspecter le fait que le gouvernement souhaitait expressément avoir accès aux informations hébergées sur le cloud de Lavabit. Une requête qui leur aurait donné accès à l’ensemble des conversations des utilisateurs du service, et a fortiori à tous les échanges d’Edward Snowden.
Que reste-t-il à Levison ?
Dans les faits, Ladar Levison pourrait décider de faire revivre Lavabit en partant à l’étranger, vers une terre plus clémente. Il n’est pourtant pas près à franchir le pas et à quitter les Etats-Unis. Il se montrera d’ailleurs admiratif du sacrifice de Snowden qui a abandonné sa vie entière pour gagner la liberté d’expression qu’il n’avait plus aux Etats-Unis. Levison a donc décidé de renoncer au salaire annuel de 50.000 à 100.000$ que lui apportait Lavabit, sans aucun plan particulier pour un avenir proche… si ce n’est se taire.
En attendant, il a décidé de faire une pause concernant les mails.
« Si vous saviez ce que je sais sur les emails, dira-t-il à Forbes. Vous ne les utiliseriez pas non plus ».