Encore une affaire de détournement de fonds éclaboussant l’ex-UMP (devenue LR pour se refaire une virginité) dans laquelle des sénateurs sont mis en cause. Le Grand Maître maçon François Thual, mentor d’Aymeric Chauprade, a reconnu être allé retirer tous les mois une somme variant entre 5000 et 6000 € en liquide d’un des comptes de l’URS pour les remettre au trésorier du groupe UMP du Sénat, Jean-Claude Carle. Ce dernier nie catégoriquement ces allégations. C’est toujours ainsi que cela se passe dans ces milieux politiques où, au lieu de servir le France et son peuple, ils se servent eux-mêmes sans compter. Le malheur est que, malgré les preuves et les aveux, la sanction qui sera prise sera, encore une fois, très douce, invitant pratiquement à la récidive.
Le juge René Cros a passé une partie de la matinée au groupe LR du Sénat dans le cadre de l’enquête sur des soupçons de détournements de fonds publics au profit de sénateurs UMP. Selon nos informations, le juge se serait intéressé aux comptes des années 2012 et 2013.
Une perquisition au Parlement, l’événement est rare. Ce matin, les locaux du groupe Les Républicains (ex-UMP) du Sénat ont été perquisitionnés pendant environ 2h30 par le juge René Cros et les policiers de la brigade de répression de la délinquance astucieuse (BRDA) de la police judiciaire parisienne, a affirmé le groupe, confirmant une information de l’AFP. Cette perquisition s’est déroulée dans le cadre de l’enquête sur des soupçons de détournements de fonds publics au profit de sénateurs UMP.
« On leur a tout ouvert »
« Dans le cadre d’une procédure qui a démarré antérieurement, ce matin, le juge s’est présenté pour nous demander des documents. Le groupe a mis à sa disposition l’ensemble des documents qu’il demandait, conformément à notre obligation de transparence, qui est notre ligne de conduite. On leur a tout ouvert » explique à publicsenat.fr le groupe LR, où on précise qu’il s’agit « d’une période ancienne, avant que Bruno Retailleau soit président du groupe ».
Le juge s’est intéressé à des documents qui concernent les comptes du groupe, ainsi qu’à des données informatiques. Selon nos informations, le juge serait parti avec les comptes des années 2012 et 2013.
Rapport de Tracfin sur les opérations bancaires du groupe UMP
Mediapart avait révélé en janvier dernier que Tracfin, la cellule de lutte antiblanchiment de Bercy, avait transmis à la justice un rapport sur les opérations bancaires du groupe UMP du Sénat après avoir passé au crible la période allant de mi-2012 à mi-2015 (voir notre article). Ce rapport révélait de nouveaux virements suspects, dont 130.000 euros pour l’ancien président du groupe, Jean-Claude Gaudin. Ces « opérations bancaires » ont été « effectuées par le groupe UMP lui-même », écrivait le site.
Le maire de Marseille, toujours sénateur, n’avait pas démenti les sommes mais évoquait « des frais de représentation par rapport à (sa) fonction de président d’un groupe de 144 sénateurs ». « J’ai toujours engagé ces frais avec des justificatifs » avait expliqué Jean-Claude Gaudin à Public Sénat. Regardez la vidéo :
400.000 euros
À l’origine, les premiers éléments de l’affaire, sur laquelle enquête les juges René Cros et Emmanuelle Legrand et révélée par Le Parisien en mai 2014, concerne deux associations sénatoriales, l’URS (l’Union républicaine du Sénat) et le Crespi (Cercle de réflexion et d’études sur les problèmes internationaux), liées à l’ancien groupe politique des Républicains indépendants. À la création de l’UMP, les familles d’origine de la droite ont perduré au sein du nouveau parti. Ce sont des anciens sénateurs des Républicains indépendants qui auraient été la quarantaine de bénéficiaires des chèques. Au total, on parle de 400.000 euros (lire notre article sur le sujet). Cet argent aurait « servi à rembourser les frais de relations publiques des sénateurs UMP, membre de l’URS, au cours de différentes élections » écrivait Le Parisien. Jusqu’en 2011, les financements des élections sénatoriales ne dépendaient d’aucune règle. Depuis 2014, la transparence est de mise.
Deux noms sont cités dans cette affaire : celui du sénateur de l’Yonne, Henri de Raincourt, ancien ministre des Relations avec le Parlement. Le siège de l’URS se situait à Saint-Valérien, commune dont il a longtemps été le maire, jusqu’en 2011. Le sénateur a présidé le groupe UMP du Sénat de 2008 à 2009. Il est aussi un ancien des Républicains indépendants. Il avait donné ses explications à Public Sénat, n’y voyant rien d’illégal et parlant du financement d’« actions politiques » (voir notre article et la vidéo).
Le sénateur Henri de Raincourt avait également reçu un virement automatique de 4 000 euros mensuels de 2008 à 2011, y compris quand il est devenu ministre de Nicolas Sarkozy. Confirmant la somme auprès de publicsenat.fr, il l’avait qualifiée de « totalement justifiée ».
L’ex-secrétaire général de l’URS mis en examen en juillet 2015
Jean-Claude Carle, sénateur de Haute-Savoie, s’est pour sa part retrouvé impliqué en tant qu’ancien trésorier du groupe. Il avait expliqué au Parisien avoir été « auditionné librement » au mois de septembre 2013 par les policiers de la BRDA. Il affirmait ne pas avoir signé de chèque au titre de l’URS. « Cette association ne verse pas non plus d’argent à ses membres » ajoutait le sénateur.
L’ex-secrétaire général de l’URS, François Thual, a été mis en examen en juillet 2015 pour détournement de fonds publics. Il avait témoigné dans Le Monde. « Jusqu’à cet été, j’allais tous les mois, ou presque, retirer entre 5 000 et 6 000 euros en liquide de l’un des comptes de l’URS, et je les remettais au trésorier du groupe UMP du Sénat, Jean-Claude Carle » avait-il affirmé en novembre 2014. « Je me rendais à l’agence Private Banking de la Société générale, boulevard Haussmann, je récupérais les espèces, glissais les billets dans ma poche et je rentrais en taxi au Sénat » avait-il ajouté. « C’est tout à fait faux. M. Thual ne m’a jamais […]
François Vignal — Public Sénat