La meilleure synthèse de la funeste séquence des 7-11 janvier 2015 de l’histoire de France reste sans doute, à ce jour, le définitif “Monde de merde” proposé par Le Gorafi.
Pour qui veut en faire une constructive extrapolation, quelques repères ont tout de même fini par s’imposer.
Le socle, rationnel aussi bien qu’émotionnel, de la condamnation unanime des crimes du 7 janvier aurait dû permettre, quatre jours plus tard, une saine refondation républicaine.
C’est malheureusement tout le contraire qui s’est produit. Le 11 janvier, entre la place de la République et la Synagogue, entre Netanyahu et Ali Bongo, ceux qui parlent au nom des Français semblent n’avoir repéré aucun des trois pernicieux trompe-l’oeil qui empêchent la reconstruction du consensus citoyen. En fait, le 11 janvier la République semble bien s’être tiré une balle dans le pied. Pourquoi ?
- Parce que ce n’est pas la “liberté d’expression” que les tueurs ont pris pour cible mais bien l’absolu dévoiement, à de basses fins commerciales, de cette liberté de dire en un permis de provoquer, d’avilir et d’injurier.
- Parce que la liberté d’expression, comme celle de la presse, ne sont en France qu’un mythe ! Il n’est pas de contorsion rhétorique qui puisse masquer une réalité aveuglante. La liberté d’expression “version Charlie” était une liberté pitoyablement sélective : le licenciement, pour une plaisanterie labellisée antisémite, de Siné par Philippe Val, en est la plus indélébile démonstration. En France, la liberté de la presse n’est pas menacée par une poignée de zélateurs du prophète des dominés. Elle a déjà été étouffée par le mur d’argent élevé tout autour d’elle par la mafia des dominants.
- Last but not least : la nationalité des tueurs, la nôtre, a servi de prétexte pour ne parler que des victimes parisiennes des kalachnikovs, occultant ainsi éhontément toutes celles, infiniment plus nombreuses, des Rafale, F 16 et autres drones. La doxa officielle, politique et médiatique, s’est évertuée à enfermer dans l’Hexagone la lecture d’une confrontation dont une écrasante majorité des victimes, bien loin de la place de la République étaient tombées non pas sous nos plumes mais bien sous nos bombes.
Le 11 janvier, à Paris, et dans toute la France, la République s’est tristement tiré une balle dans le pied.
François Burgat
- Source :
http://lequotidienalgerie.org/
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