Les banksters, non les banquiers !
Il est de bon ton de s’en prendre aux banques, tout comme les bolchevistes s’attaquaient aux bourgeois et plus particulièrement aux “petits bourgeois”, que les démocrates allemands du dix neuvième siècle qualifiaient de “Philistins” par allusion aux Palestiniens ou occupants naturels sur lesquels le fabuleux Samson fit s’écrouler un temple en brisant les colonnes ! Il en va de même des temples de l’argent que nous sommes invités à détruire, à commencer par cette monnaie dont on veut remplacer le cours par des éléments électroniques ; le monde ressemblerait fort bien à un malade dont les médecins varieraient le traitement par des injections successives, mais en tous les cas les grabataires sur leur lit geindraient contre les banques, en imaginant un monde sans argent, où chacun recevrait de quoi survivre, la mort achevant seule un cours d’existence médiocre.
Ces banksters doivent dans les années trente du siècle dernier, leur nom à un homme courageux, fort spirituel, éloquent et instruit, d’une famille ayant donné une dizaine de jésuites, de 1841 à 1941, dans le nord de la France occupée par la troupe royale, et qui resta longtemps attachée à l’Empire ou communauté des peuples européens, au point que les Jésuites qui avaient défendu les gens d’Arras, par exemple, contre les assauts de la monarchie française, maintenaient nos gens du Nord dans les limites de la Province de Belgique. Cet homme, inventeur de cette expression tant usée aujourd’hui, était Léon Degrelle qui échappa à la furie des vainqueurs, à tous ces Samson qui avaient fait écrouler le temple européen, en se réfugiant, comme soutenu par Mercure, par la voie des airs, de la Norvège au pays basque.
Mais si les gens sont aujourd’hui partagés en deux catégories, ceux qui amassent un argent dont ils ne sauraient garantir la durée de jouissance, et ceux qui veulent détruire ce qu’ils n’ont pas, sans pouvoir concevoir un mode de relation qui tienne compte des impératifs techniques, de la démographie, et d’une discipline de vie en rapport avec la puissance collective ou individuelle, ils partagent le même préjugé de tantôt aimer ou haïr le même objet de leur désir, mais se refusent, par une éducation insuffisante des sens, à comprendre les rapports humains.
Tous nos modernes jacobins, tous nos bolchevisants qui ont pénétré l’appareil d’État tout en appelant à le détruire “en faisant du passé, table rase” conduisent le troupeau à l’abîme.
Le résultat bien observable est la diminution de la propriété, le goût croissant des petites collectivités où les plus faibles vivent non plus de la force des meilleurs, mais de la diminution de leurs capacités, par une expérience de cette égalité ou indivisibilité du corps social que les utopistes ont rendu familière, et que l’imagination rend réelle à des corps de moins en moins habitués à l’effort individuel et collectif.
La suppression de l’argent que les Jacques Attali et autres bergers de ce troupeau visible gonflant nos villes tentaculaires, nous font insensiblement admettre, conduira à une tyrannie des plus féroces que le monde ait connue. Il est entendu que toute forme d’honnêteté sera jugée inhumaine, hypocrite, et qu’un honnête banquier sera un oxymore, tout comme le bolchevisme a fait durablement accepter l’identité du gouvernement et de la dictature, ou à parler plus largement, de l’amour et de la violence, comme il se voit dans les théories du genre.
S’agit-il de requalifier nos banquiers ou plus exactement de les séparer, comme il est évangéliquement parlé des bons et des mauvais bergers ? Et cela de façon générale, en prenant exemple sur une parabole, celle du bon grain et de l’ivraie, que nous nous permettons de transposer ainsi : le propriétaire d’un champ, Dieu étant ce propriétaire, sema et la nuit, le mauvais esprit répandit de l’ivraie : au matin, les Anges qui sont l’intelligence pure, représentèrent au propriétaire qu’il fallait extirper la mauvaise graine immédiatement: à quoi le maître des destinées du champ de répondre que pareille opération emporterait le bon avec le mauvais et qu’il fallait que tout vienne à sa fin. Cette patience du “penser”, par quoi, du reste, le vieil Heidegger entendait caractériser la philosophie active européenne, serait seule salvatrice ou productive, féconde.
Tous nos modernes jacobins, tous nos bolchevisants qui ont pénétré l’appareil d’État tout en appelant à le détruire “en faisant du passé, table rase” conduisent le troupeau à l’abîme. Une réaction est inévitable, et l’intelligence doit, pour cela, calmer son impatience et distinguer entre le bon grain et l’ivraie, les banksters et les banquiers, les bergers et les séducteurs, bref, comme nous l’avons déjà écrit, en citant un des frères Grimm, auteur des contes pour enfants, refuser “ces semi vérités auxquelles les Français ne sont que trop enclins”.
Pierre Dortiguier
Photo d’illustration :
Le Prêteur et sa femme : tableau réalisé par le peintre flamand Quentin Metsys en 1514, exposé au musée du Louvre.