C’est génial cette façon de présenter les journalistes occidentaux systématiquement comme des chevaliers blancs de l’information, de la démocratie et des droits de l’homme. Puis, comme par magie, 30 ans plus tard, on lit sur les étagères de la Fnac les mémoires qui expliquent que ce journaliste était agent de la DGSE, de la CIA ou du Mossad voire les trois en même temps. On peut citer pour exemple le père biologique de Marion Maréchal Le Pen qui cumulait toutes ses fonctions prestigieuses…
Le photojournaliste français Mathias Depardon, détenu pendant un mois en Turquie, a estimé, à son retour en France vendredi soir, qu’Ankara avait voulu adresser « un message assez fort » aux reporters souhaitant se rendre dans le sud-est du pays.
Arrêté le 8 mai, le photographe, dont l’avion s’est posé peu après 22 h à l’aéroport de Roissy, s’est dit « heureux d’être à Paris, d’être en France ». « Je vais très bien », a-t-il assuré devant la presse, affichant un large sourire, mais l’air visiblement fatigué.
Mathias Depardon s’était auparavant entretenu par téléphone avec le président de la République, Emmanuel Macron, qui avait annoncé son retour en France dans la soirée sur Twitter. Il a été accueilli par le directeur de cabinet de l’Élysée, Patrick Strzoda, et le conseiller diplomatique Philippe Etienne.
“Très peu de contacts avec les autres détenus”
« J’ai été accusé, a dit le journaliste, de propagande terroriste et d’aide et soutien à des groupes terroristes, à savoir le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, séparatistes kurdes) suite à des images que j’avais faites ces dernières années, dont je ne cachais pas l’existence ».
« Ce qui est compliqué, c’est qu’on ne sait pas combien de temps on va rester en détention […] Je savais que légalement je pouvais être détenu jusqu’à un an », a souligné Mathias Depardon, barbu et portant une veste en jean, précisant qu’il avait eu « très peu de contacts, voire aucun, avec les autres détenus ».
L’expulsion de M. Depardon survient au lendemain d’une visite de sa mère dans le centre de rétention de Gaziantep où il avait été transféré un mois auparavant.
« Je pense que l’idée était d’envoyer un message assez fort adressé aux journalistes étrangers et turcs qui veulent faire des sujets dans le sud-est de la Turquie », a-t-il dit.
De vives inquiétudes
Emmanuel Macron avait demandé le 3 juin à son homologue turc Recep Tayyip Erdogan le retour « le plus vite possible » dans son pays de Mathias Depardon, qui faisait l’objet d’un ordre d’expulsion depuis le 11 mai.
Le photojournaliste a adressé de nombreux remerciements, citant notamment « l’Élysée, le président de la République, le Quai d’Orsay, l’ambassade de France en Turquie », ainsi que les confrères et tous les membres de son comité de soutien, et l’association Reporters sans frontières (RSF).
Sa détention a suscité l’inquiétude des défenseurs de la liberté de la presse qui dénoncent une dégradation des conditions de travail des journalistes turcs et étrangers en Turquie.
Installé en Turquie depuis cinq ans, ce journaliste indépendant âgé de 37 ans a été arrêté à Hasankeyf (sud-est), où il réalisait un reportage pour le magazine National Geographic, au motif qu’il travaillait sans carte de presse.
« Détention absolument injustifiée »
Les autorités turques l’ont ensuite soupçonné d’avoir fait de la « propagande terroriste » pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux des photos prises au cours d’un reportage sur le PKK.
« C’était une détention absolument injustifiée. C’est un mois de perdu dans la vie d’un homme », a déclaré Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF.
Sur Internet, notamment parmi ses confrères français, une mobilisation avait été déclenchée en faveur de la libération du photojournaliste, avec sur Twitter le mot-dièse #FreeMathias.
Mathias Depardon est le dernier d’une série de journalistes européens arrêtés ou expulsés par les autorités en Turquie, où les conditions de travail se sont dégradées au cours des derniers mois pour les professionnels des médias, en particulier depuis le putsch manqué de juillet.
Olivier Bertrand, un journaliste français, et Gabriele Del Grande, un journaliste italien, ont été arrêtés et expulsés ces derniers mois.
« Espionnage » et activités « terroristes »
Un journaliste germano-turc, Deniz Yücel, est quant à lui accusé d’« espionnage » et d’activités « terroristes » et a été incarcéré.
Les organisations de défense de la liberté de la presse dénoncent des atteintes régulières à cette liberté de la part des autorités turques, notamment depuis la tentative de coup d’État du 15 juillet.
Plus de 100 journalistes turcs sont actuellement incarcérés en Turquie, et le gouvernement cible parfois les correspondants étrangers.
Ce pays occupe la 155e place sur 180 au classement 2017 de […]
Ouest France