Platon a toujours raison !
Ce sentiment s’accorde avec un passage du dieu des philosophes, présentant le chaos final – sorte de Kali Yuga – d’un monde renversant l’ordre et la justice, faisant que les enfants naissent âgés, car ressemblent à des vieillards abandonnant toute innocence et les vieillards, en revanche, se conduisent et sont traités, du reste, comme des enfants satisfaisant leurs caprices et progressivement privés de raison ! La fin des temps ainsi présentée, comme une fable plaisante, dans ce désordre universel touche aussi, tout comme le gouvernement démocratique, tyrannique ou oligarchique, comme il les dénomme, les hommes ne faisant que la plus mince différence entre le juste et l’injuste dans la course à la richesse, et affecte le rapport entre d’une part, les élèves ou apprenants et leurs maîtres : ce ne sont plus ces derniers qui imposent un devoir qu’ils auront jugé bon, aux élèves, mais ceux-ci qui jugent de ce qu’il ne faut pas savoir, et comme l’exemple des candidats d’anglais au baccalauréat de cette session 2016, de protester et pétitionner, avec le concours de leurs parents, contre leur sujet. Il en va pareillement, précise Platon, des comédiens qui dictent son texte à l’auteur, comme il se voit dans les débordements indécents et impudiques des festivals.
Il ne sert à rien de se lamenter, sans relever les causes de cette injustice, ou rapport faussé entre celui qui instruit et qui reçoit, sans en établir la cause technique autant que morale. Il suffit de consulter un livre d’Anglais de la classe de Première, comme celui que j’ai sous les yeux des feux A. Laffay – qui fut mon maître parisien à Henri IV – et H. Kerst, des années soixante-cinq, par exemple, paru chez Masson, 321 pp., relié, avec des photographies, assorti d’une carte géographique en couleur de l’Angleterre et des États-Unis avec les fuseaux horaires, et assorti d’un Précis grammatical identique de la 4e à la 1e, en annexe, de 60 pages sans compter la liste des verbes irréguliers, pour constater la dégradation de l’âme de l’enseignement, car derrière tout état matériel, tel est l’enseignement platonicien, il y a une âme, bonne ou mauvaise, qui -le mot le dit – anime précisément le cours des choses, impulse le Devenir.
Et la suprême mesure ou harmonie est dans la vie d’un « État un », où l’organisme général se possède lui-même, alors qu’il se livre partout ailleurs au désordre, veut amasser des biens, selon la formule des Lois, en restant vide !
Je n’ai plus le droit, à citer encore Platon, ayant atteint mes soixante-quinze ans, à obtenir un poste de Censeur des mœurs dans sa Cité grecque, et de fait, je poursuis mes observations en retraite, et conserve mon premier étonnement néanmoins d’avoir appris de mes élèves qu’ils ne faisaient plus, comme leurs parents désorientés, de version et de thème, donc n’exerçaient pas leur esprit à la compréhension commune et de leur langue native et de la langue étrangère. Ne cherchez pas davantage la cause de cette maladie de l’âme qui la prive d’une volonté de compréhension et insensiblement de toute capacité d’attention. Il en va de même de l’enseignement de la géographie qui refuse la mère des Muses, la mémoire et donc ce Manhattan qui a échappé aux candidats protestataires n’aura jamais été appris, sauf s’ils regardent les sites complotistes ou catalogués antisémites ! L’on accuse maladroitement mes collègues professeurs d’anglais de ne point réussir à faire apprendre la langue d’une fille dont l’allemand est la mère, et il y a un échec général irrécusable, quoique logique : le but de l’enseignement est en effet de faire comprendre, avons nous déjà écrit ici, la logique d’une manière de s’exprimer. L’exercice pratique lui est subordonné et n’est pas premier.
Il s’agit, au reste, en toute matière d’enseignement de faire sentir la mesure dans les productions de l’art, que ce soit la langue, la musique, la philosophie générale – dont la logique – ou les mathématiques au sens large. S’en éloigner est livrer – pour reprendre l’ample philosophie de Platon – l’âme au désordre et en faire une rebelle perpétuelle incapable de se maîtriser et donc de servir de guide à autrui, juste bonne à la folie, des matériaux pour Marx, Nietzsche, Freud et le daéchisme en Orient et les mélanchonismes et Trotskismes en Occident, les Verts etc. Tout est subordonné à l’immédiat. À cet égard, Platon s’oppose déjà au Rousseau définissant la musique comme l’ensemble des sons qui plaisent à l’oreille. Non, instruire musicalement, au sens le plus vaste, est faire découvrir la mesure. Et la suprême mesure ou harmonie est dans la vie d’un « État un », où l’organisme général se possède lui-même, alors qu’il se livre partout ailleurs au désordre, veut amasser des biens, selon la formule des Lois, en restant vide !
Platon ajoute un point, dans un livre de ses Lois, que s’il est nécessaire de bannir l’injustice de soi, comme un corps crache le poison, il est encore mieux de la traquer partout chez autrui et dans ses variétés, sous peine, dans le cas contraire d’affaiblissement. C’est le but que se propose le site du Libre Penseur. Dieu est innocent, précise-t-il !