
La fin et les moyens, dans la terreur turque
Il y a un caractère particulier des actions commises sur le sol de la présente République turque traditionnellement gérée par des gouvernements appuyés sur les forces armées, depuis la guerre froide qui exécutait parfois ses chefs civils, celui d’une part, de la neutralisation de toute influence politique de celles-ci, alors que le pays est secoué d’attentats et d’embuscades par des milices kurdes très bien équipées, et d’autre part de la relative facilité avec laquelle des groupes politiques, au sens large en y comprenant des mafiosi du pétrole, peuvent exercer la violence.
Cela mêle un sentiment national d’insécurité à un besoin d’autorité que manifestement le gouvernement d’Erdogan ne peut satisfaire. Quelle est donc son entrave ? Si l’on veut apprécier le nouveau rapport géopolitique de cette puissance turque dont l’entrée entière en Europe – car elle y est économiquement – rehausserait, aux yeux de son ancienne alliée allemande, le poids du continent, il faut relever deux points : la consolidation des liens avec la Russie, d’une part, qui efface l’incident aérien d’il y a quelques mois et impulserait ce marché eurasiatique que Poutine veut organiquement lier à l’Europe, et, selon nous, conjointement ou parallèlement, l’établissement d’un lien plus assuré qu’autrefois ou plus ouvert, avec l’entité sioniste, annoncé dans le même temps que Netanyahou revenait de son quatrième voyage dans l’ancienne Mecque du communisme soviétique – une Soviétie dont l’étoile rouge figure toujours sur les uniformes de l’Armée fondée par Trotski ! Le troisième point qui rapprocherait la Turquie de la Russie, outre le projet pétrolier et gazier, est la recherche d’un équilibre avec l’Iran, tandis que, comme un aboiement continuel, l’Arabie saoudite renforce son arsenal en prévision d’un conflit.
Nous assistons donc, à travers les éclats du terrorisme – notion englobant autant les guerres en pays kurde, que les massacres commis par des GI’distes – à la naissance d’une nouvelle architecture, à l’élévation d’un bâtiment dont les fondations sont visibles, mais dont on a peine à imaginer les dimensions ! Pareille construction a trois conséquences : la résolution de la “question kurde” par la formation d’une marche syro-irakienne, après que le sort de Mossoul aura été décidé non par une victoire de l’armée irakienne seule, ajoutée aux milices kurdes, mais par la volonté de toute la coalition américano-russe et allée de réduire le périmètre d’action de Daesch. Cette solution aurait l’approbation de l’entité sioniste, puisque reconnaître ou établir des liens étroits avec elle revient à assurer sa sécurité ! Cela vaut de Moscou à Ankara et au Pentagone (Paris étant intégré, comme Londres, l’Allemagne résignée n’ayant plus son mot à dire depuis deux générations, sauf pour payer !) ! Le corollaire en est la résolution par réduction à l’impuissance, de la dite question palestinienne insérée ou ramenée, réduite à ce processus sécuritaire ; toute résistance arabe étant désormais identifiable à du terrorisme, comme un homme est tenu pour mécréant par tout membre d’une secte et l’entité sioniste imaginée au Casino de Bâle par un homme de paille – car Munich n’en voulu point sous pression rabbinique – a été une œuvre sectaire, un nouveau pion avancé sur l’échiquier mondial ! Le troisième point des nouvelles alliances conclues dans le fracas du terrorisme non identifiable est le pendant de la migration en Occident, à savoir l’intégration de l’Orient à une forme d’OTAN ou de nouveau Pacte élargi de Bagdad – comme il en fut pendant la “guerre froide”, quand on affectait de combattre un communisme que l’on avait sauvé de l’assaut conduit par l’Allemagne désireuse d’effacer la défaite de 1918 causée plus par des intrigues intérieures et des mutineries ou le minage du moral de la troupe par des agitateurs professionnels, bref par le terrorisme, que par la stratégie militaire !
La grande victime à sacrifier, pour consolider les trois projets indiqués, voilés par le terrorisme, est la Syrie ! Et l’idiotie de l’opposition syrienne, dite démocratique, cajolée par toutes les puissances, sera bien mesurée par l’attribution qu’elle fait au gouvernement légal du pays d’avoir organisé l’attentat contre un village chrétien libanais. A ce degré de bêtise convient la formule contre-révolutionnaire ou antijacobine du philosophe Hegel, dans une œuvre de jeunesse, que le vide de la Raison engendra la Terreur, et ce vide s’amplifie ! Que la Turquie comble ce vide, et se débarrasse de ses sectaires !